EDITO 782 – LA COMÉDIE DU POUVOIR (FRANÇOISE GIROUD / MLS)

Voici ce qu’écrivait Françoise Giroud (*), en avant-propos de son ouvrage « La Comédie du Pouvoir », publié en 1977, il n’y a pas loin d’un demi-siècle, après avoir passé 3 ans au gouvernement…

« Du lieu même où se situe – où se joue – la comédie du pouvoir, ministre pendant trois ans, j’en ai vécu les scènes, côtoyé, les interprètes, entendu les répliques.

Cette situation m’a enseigné que, si bien informé que l’on soit, cette comédie est impénétrable à qui n’y a, pour sa part, participé.

En est-on ? On se tait par force. En sort-on ? On se tait, par espoir d’y retrouver un rôle. Ou par crainte de représailles.

En tout cas il y a connivence. Donc silence, observé généralement jusqu’à ce qu’il puisse être rompu sans porter ombrage à ceux qui disposent du pouvoir d’État.

En écrivant avant que l’Histoire ne se fige et que les hommes ne disparaissent de la scène, je n’ignore pas que je m’expose à la vindicte de certains parmi ceux qui sont en cause en ce récit. La loi du milieu n’est pas tendre aux dissidents. Les lauriers sont coupés, je n’irai plus au bois.

Aurai-je pour autant l’appui de leurs adversaires ? Non, puisque je n’espère pas d’eux qu’ils changent la nature, ni la pratique du pouvoir d’État – à supposer qu’ils y accèdent.

Un gouvernant a beau déclarer la guerre aux gouvernants qui l’ont précédé, il est plus facile de les combattre que de ne pas leur ressembler.

Trouverai-je du moins, l’adhésion de ceux qui n’ont rien à faire du Pouvoir, ni avec le Pouvoir d’aujourd’hui ou de demain ?

C’est pour eux que j’écris avec l’espoir d’apporter quelques réponses aux questions qu’ils se posent.

Mais les Français aiment les rois, ne fut-ce que pour avoir le plaisir de leur couper la tête de temps en temps… »

Françoise Giroud – La Comédie du Pouvoir (1977)

(*) Secrétaire d’État à la Condition Féminine, puis à la Culture (sous la présidence de Valéry Giscard d’Estaing)

 

 

Il semble nécessaire, en cette période budgétaire, de pointer la dérive en cours du gouvernement Barnier.

On ne pourra certes pas lui imputer à lui seul la situation catastrophique de notre pays en matière de finances publiques, le dernier budget en équilibre – ce qui devrait pourtant être la règle – fut voté… il y a 50 ans !

Mais ce qui est contestable et constitue une faute majeure, c’est la méthode employée pour tenter de remettre la France en ordre de marche.

Certes le gouvernement Barnier, après l’incurie des quinquennats précédents n’est pas seul responsable du désastre et n’avait que peu de temps pour construire un budget pertinent.

Mais il fallait au moins montrer une volonté claire de réduire les charges de l’État, AVANT de ponctionner encore plus le pouvoir d’achat des Français, déjà saignés à blanc.

Dans toute unité économique (qu’il s’agisse d’un ménage ou d’une entreprise), on ne PEUT pas dépenser plus qu’on ne gagne. C’est une évidence, et c’est également vrai sur le long terme pour un État.

Or, chacun sait que, depuis le double septennat de Mitterrand, l’État vit au dessus de ses moyens en tentant de combler les déficits… par des augmentations des impôts et des taxes ! Une seule exception, sous Sarkozy, qui avait mis en place un processus de régulation (la RGPP – Révision Générale des Politiques Publiques –) qui fut sabré par Hollande dès sa prise de fonctions !

Aujourd’hui, on ne peut – on ne doit – pas décider d’équilibrer autoritairement les comptes publics par une simple augmentation des recettes. Évidemment, c’est si facile, quand on est énarque et qu’on ne connait RIEN à la vie de l’entreprise, de décider d’un coup d’augmenter les prélèvements et taxes fiscales et parafiscales, plutôt de de réduire les charges de l’État. Mais ce sont des choses sans doute qu’on n’apprend peut-être pas à l’ENA, encore moins à Sciences Po…

En cette période budgétaire, on ne devrait entendre parler que d’économies, de gestion, de réduction des coûts de fonctionnement… Or, on ne parle que de décisions qui auront un impact immédiat (négatif) sur le pouvoir d’achat, pourtant l’un des soucis prioritaires des Français !

La baisse induite du revenu disponible aura des effets pervers sur la consommation qui va baisser, entraînant une chute de ce qui reste de croissance.

On ne peut demander des efforts financiers aux Français qu’à la condition de montrer l’exemple, en serrant et réduisant et optimisant le coût de fonctionnement des services, partout où c’est possible.

C’est sans doute un détail mais comment oser envisager des augmentations des budgets du Parlement (Assemblée Nationale et Sénat) ? Est-ce de l’incurie ou de la provocation ?

Comment oser cibler les retraités ? Avec le risque de remettre sur le tapis l’inégalité entre privé et public : montant calculé sur les 25 meilleures années pour le privé et… les 6 derniers mois pour le public !

Dans cette ambiance délétère et cet univers d’incompétence, Eric Ciotti a mille fois raison de réclamer une Commission d’Enquête sur la dérive des comptes publics. 

S’il veut éviter une motion de censure, le Premier Ministre ferait bien de réfléchir à cette vieille maxime de bon sens : « On ne fait pas prêcher la vertu par une putain ». 

13 octobre 2024

Marc Le Stahler

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