Pourquoi il est important d’aller voter au second tour de la primaire : à 48 heures du premier tour, l’institut OpinionWay et Le Point.fr avaient sondé un échantillon des téléspectateurs qui ont regardé le débat opposant les sept candidats. Thème par thème, et sur l’ensemble de la confrontation, voici les résultats de ce 18 novembre.
Pour OpinionWay, c’est Alain Juppé qui a le plus séduit les téléspectateurs de France 2 et les auditeurs d’Europe 1. À la question « lequel des candidats vous a le plus convaincu ? », l’ancien Premier ministre est arrivé en tête avec 30 %, devant François Fillon, qui était à 25%, et Nicolas Sarkozy, qui n’aurait convaincu que 13 % des Français qui ont regardé le débat (1.003 personnes). Parmi les personnes qui avaient l’intention de voter à la primaire (230 individus), Fillon a obtenu 38%, devant Juppé à 26% et Sarkozy à 23%. Si l’on ajoute à cela l’impact du débat sur l’image des candidats parmi les téléspectateurs qui avaient l’intention d’aller voter, 59% d’entre eux ont eu une meilleure opinion de François Fillon après ce débat et 2 % seulement, une moins bonne, Juppé se contentant d’un modeste 5%, tandis que les cinq autres terminaient dans le rouge.
Donc, ceux qui regardaient les débats préféraient Juppé, mais ceux qui déclaraient leur intention d’aller voter préféraient Fillon : (38 % + 59%) / 2 = 48, 5%, on n’est pas loin du score obtenu finalement par Fillon.
À la veille de ce second tour, 215 élus se sont révoltés dans une tribune publiée par Le Figaro. Ces élus, parmi lesquels Bruno Retailleau et Christian Jacob, présidents du groupe les Républicains au Sénat et à l’Assemblée, ainsi que François Zocchetto, président du groupe centriste à la Haute Assemblée, déplorent les critiques qu’Alain Juppé a adressées à François Fillon ces derniers jours et appellent à « un débat franc mais respectueux des uns et des autres ». Et Bernard Debré l’interroge : « As-tu perdu la tête ? » demande-t-il à Juppé dans une lettre ouverte publiée sur son blog où il lui rappelle qu’il a lui aussi été ministre d’État de Sarkozy après avoir été le premier ministre de Chirac, le créateur du regroupement familial cause importante de la vague migratoire.
Il est vrai que sur Fillon, Juppé frappe fort et surtout frappe bas. Mais il est probable que cela lui nuise plus que cela ne lui réussit, car beaucoup d’observateurs ont constaté qu’il a repris les attaques de la gauche contre Fillon, par exemple sur l’IVG, le fait qu’il ait été le « collaborateur » de Sarkozy et partage son bilan, ou dise que Marine Le Pen et Poutine ne sont pas infréquentables.
Ce faisant, Juppé a confirmé son ancrage à gauche. Il se noie dans la bile froide qu’il déverse sur Fillon.
En réalité, Juppé, qui se croyait élu d’avance et disait à son entourage « c’est normal, c’est à mon tour« , est fou de rage. Perdu pour perdu, il tire à vue ! Sa tactique : faire passer Fillon pour Hitler, la tactique du « reductio ad hitlerum » que la gauche réservait jusqu’ici à la famille Le Pen avec le succès que l’on sait : avoir fait passer le FN à 35 % d’opinions favorables chez les Français.
Fillon est contre l’avortement (à titre privé), contre le Mariage pour tous (c’est un crime !)… Contre quoi encore ? Contre Hollande !
Samedi, l’argument de Juppé pourrait devenir : si je ne suis pas élu, plutôt Hollande que Fillon !
Une tactique non seulement débile mais indigne, que Boulevard Voltaire résume ainsi : « Le plan de campagne de l’entre-deux-tours tient en trois points : jeudi, Fillon est au FN ; vendredi au Ku Klux Klan ; samedi, si tout marche bien, les Sarthois quittent le département pour venir se réfugier dans la banlieue de Bordeaux. Dimanche : triomphe. Emballé, c’est pesé. » BV se demande même si de dépit Juppé ne va pas se présenter à la primaire de la gauche « pour retrouver cette famille qui lui a tant manqué« .
Nicolas Sarkozy, a su quitter la scène dimanche soir avec élégance et cohérence, en apportant son soutien à François Fillon. Juppé, quant à lui, aurait mieux fait de renoncer à ce second tour et de reconnaître la victoire de Fillon. Il en serait sorti grandi et aurait épargné à la France le spectacle dégradant de sa déchéance politique et intellectuelle. Mais finalement, ce dernier combat de Juppé est à l’image des erreurs et des aveuglements du personnage. On a assez dit que le positionnement centro-gauchiste de M. Juppé était la principale cause de son échec du premier tour et de l’envolée de François Fillon qui a occupé une position centrale (et non centriste) au sein de la droite (en y incluant Le Pen), plébiscitée par l’électorat de droite. La façon qu’a Juppé d’attaquer Fillon avec des arguments de gauche ne fera que renforcer la légitimité de celui-ci au sein de l’électorat de la droite traditionnelle.
Il y des « détails » qui ne trompent pas. Au cours des trois dernières années, 34 % des Français ont eu des difficultés pour payer leur facture d’énergie, selon le magazine 60 millions de consommateurs paru jeudi. Voilà où se gagnera la prochaine présidentielle. Elle se gagnera par le vote massif d’une population stigmatisée comme « pitoyable » aux USA par Hillary Clinton, et « populiste », limite « facho » par la gauche en France.
Leader de l’élite friquée, Juppé ne l’a pas compris.
Gérald Darmanin, maire LR de Tourcoing (Nord), qui a soutenu Nicolas Sarkozy, a parfaitement tiré la leçon de la primaire dans un entretien accordé au Figaro : Ce qui pose problème à la droite française dans son ensemble, et notamment dans la perspective de la prochaine présidentielle, c’est que les classes populaires ne sont pas venues voter (à la primaire). Je le vois dans mon département du Nord et dans notre région des Hauts-de-France […]. La participation dans les villes populaires y est inférieure à 7%, quand elle est montée jusqu’à 20% dans les communes plus “bourgeoises”. C’est le paradoxe de la primaire : elle est à la fois un grand succès de participation et, pourtant, les classes populaires ne se sont pas déplacées… C’est un désaveu pour l’ensemble des candidats de la droite. Ma crainte, c’est que l’on ne soit plus capable de parler aux classes populaires, aux ouvriers, aux employés, aux femmes seules, aux retraités modestes. Or, ces électeurs constituent la majorité des voix pour une élection présidentielle. Si la droite s’en désintéresse et si notre discours ne se concentre que sur la défense du libéralisme et la suppression de l’ISF, le FN fera, à la prochaine présidentielle, un score tout aussi surprenant que le résultat que l’on a eu dimanche. »
Fillon a-t-il su parler au peuple ?
On le saura dimanche soir.
Mais dimanche, il faut aller voter.
Il faut aller voter, car si l’on en croit la ministre socialiste inconnue Laurence Rossignol interrogée sur Radio Luxembourg, les 600.000 votants de gauche à la primaire de la droite (sur 4.130.000 votants), ont bien voté Fillon pour éliminer Sarkozy et s’apprêteraient maintenant à voter Juppé, leur champion, pour éliminer Fillon. Il appartient aux patriotes de voter Fillon pour que la présidence échappe en mai prochain au centro-gauchiste Juppé et appartienne à la droite, soit à Fillon, soit à Marine Le Pen.
L’Imprécateur