« Les solutions à nos difficultés ne viendront pas des seules “élites” qui n’ont pas toujours perçu les évolutions de notre société et de nos besoins. J’en prends ma part de responsabilité ! » . Jolie façon de reconnaître l’incompétence (partielle) de nos élites.
Effectivement…
Mardi de la semaine dernière, le « coming out » socialiste d’Alain Juppé dans son entretien avec David Pujadas est passé quasiment inaperçu. C’est « en mon âme et conscience… après avoir mûrement réfléchi« … qu’il a conseillé aux français de voter socialiste !
Frédéric Barbier, le candidat socialiste dans le Doubs, l’en a chaudement remercié lundi matin (BFMTV), ainsi que « Madame Kosciusco-Morizet, l’UDI et le Modem« .
Les Français savent maintenant que s’ils veulent un changement de la politique désastreuse menée depuis bientôt trois ans, ils devront se méfier de ces socialistes en situation d’entrisme à l’UMP, Juppé et NKM.
L’UMP est en train de se « centriser » sur le modèle Modem et UDI, et n’aura donc aucune chance de participer au second tour de la présidentielle, sauf si elle affirme clairement qu’elle est à droite, et le montre en adoptant un programme qui reflète les aspirations du peuple français.
Ce peuple, majoritairement à droite – 70 % quand on additionne toutes ses composantes – se retrouve quand même avec des socialistes au pouvoir parce que ses élites si fières d’êtres sorties de l’ENA « n’ont pas toujours perçu les évolutions de notre société et de nos besoins. »
Juppé a raison. Mais trop tard ! 45 ans de vie politique pour comprendre cette évidence !
La candidate malheureuse du F.N. n’a pas remporté l’élection partielle mais, il faut l’en féliciter, ça s’est joué à un cheveu. 49,6 contre 50,4 (à 9 h du matin, « résultat officiel » mais modifié à la baisse deux heures plus tard). Certains villages ont voté à plus de 60 % pour le F.N. Elle a perdu parce qu’elle a eu deux handicaps : le duo Juppé-NKM, mais aussi le fait qu’elle était parachutée dans le département. Le parachutage est toujours mal perçu par les gens du cru qui préfèrent quelqu’un de connu à un « étranger ». Frédéric Barbier est « un gars du pays », cela lui a donné un petit avantage. Mais est-il un gars du PS ? C’est moins évident :
Républicain, oui. Socialiste ? Il n’en est pas fier et ne l’affiche pas
Non seulement le nom du parti qui l’a investi (le PS) ne figure pas sur les bulletins de vote, mais encore la mention « ENSEMBLE POUR LA REPUBLIQUE » apparait clairement comme une espèce de nouveau parti politique catalysant la peur panique du PS et de l’UMP réunis, dont la vocation avouée serait exclusivement de faire barrage au FN.
L’UMP n’avait pas cependant pas choisi comme candidat une lumière, c’est le moins que l’on puisse dire ! On a rarement vu un maladroit pareil, et comme Juppé, Fillon et Raffarin sont à l’origine de ce choix, on peut se demander s’il ne serait pas prudent de vérifier la qualité des autres candidats de l’UMP pour les prochaines provinciales.
La gauche a évité de justesse la catastrophe. Même si les prochaines élections opposent le PS au FN, le PS n’est plus certain du tout de l’emporter, y compris à la présidentielle.
Cette partielle a démontré deux choses. Le F.N a maintenant des réserves à mobiliser entre les deux tours, en grande partie à l’UMP dont les militants et sympathisants ont compris que certains de leurs dirigeants préfèrent le socialisme par solidarité de classe et d’idéologie, mais, c’est plus surprenant, à l’extrême gauche aussi pour qui le socialisme est devenu l’ennemi à abattre en priorité. Les motivations des uns et des autres ne sont pas les mêmes, mais le « tout sauf le socialisme » commence à prendre en France, il n’y a que Juppé, Raffarin et NKM à ne pas l’avoir compris.
Il y a eu, dans les villes du Doubs, des bureaux de vote où l’on a dénombré de nombreux musulmans, mais le résultat ne démonte pas qu’ils aient voté majoritairement socialiste. Il faudra attendre le résultat détaillé par bureau pour le savoir, mais ce sont bien les villes du Doubs largement peuplées d’immigrés qui ont fait pencher la balance en faveur du socialiste.
Une élection partielle ne fait pas le printemps, mais elle donne néanmoins des indications précieuses.
L’abstention très forte du premier tour où aucun des trois candidats n’a obtenu plus de 12 % des inscrits en est une. Elle montre que les Français restent majoritairement déçus par leurs partis politiques. Cependant, ils sont tentés de tester celui qui n’a jamais gouverné en se disant que de toute manière il ne peut pas être pire que les deux autres.
UMP et PS ne peuvent plus prétendre s’excuser de leurs échecs en invoquant le passé ou la crise. Leur problème de fond, c’est qu’après trop de mensonges et de promesses non tenues ils n’inspirent plus confiance et que sans confiance, gouverner est très difficile.
Les exemples ne manquent pas en Europe et ailleurs de pays qui étaient dans des situations pires que la nôtre et qui s’en sont sortis ou sont en voie de le faire : Allemagne, Angleterre, Irlande, Espagne, Portugal, Danemark, Canada…
Tous ont un point commun : leurs dirigeants ont eu le courage d’annoncer des réformes sévères qui n’épargnaient pas leurs fonctions publiques et leurs classes dirigeantes.
Notre problème en France est que les Français constatent que les efforts sont demandés toujours aux mêmes – les classes qui produisent de l’impôt – et aucun effort ou presque à ceux qui vivent de l’impôt : politiciens, fonctionnaires, syndicats, bénéficiaires de niches fiscales, assistés en tous genres. Avec au sein de ces bénéficiaires de l’impôt des disparités de plus en plus criantes.
Comment se fait-il que l’écart entre les rémunérations des fonctionnaires déjà les mieux payés, les A+ et les « petits » fonctionnaires, B, C, et NES territorial se soit accru depuis que les socialistes sont au pouvoir, écart souvent obtenu par des primes qui seront par exemple de 4 % pour un employé communal et de 50 % pour un « haut » fonctionnaire (source emploipublic.fr).
Comment aussi se fait-il que les salaires des fonctionnaires soient plus élevés et progressent plus vite que ceux du secteur privé à emploi égal ? Par exemple, « les fonctionnaires de catégorie C dans la FPE (Fonction Publique d’Etat) perçoivent un salaire annuel moyen de 21.880€ nets, soit une évolution de 1,7% entre 2006 et 2011, alors que les employés du secteur privés sont rémunérés en moyenne 18.650€ nets par an, soit une croissance de 0,8% sur la même période« . (source emploipublic.fr)
Inutile de dire, comme on le fait à l’UMP aujourd’hui, que l’on va lutter contre le PS et le FN avec un programme d’enfer, si celui-ci n’annonce pas d’entrée de jeu une réduction sévère de la dépense publique, du nombre des élus et des fonctionnaires, l’arrêt des subventions aux syndicats qui n’en auraient nul besoin s’ils avaient des militants, aux entreprises qui n’en n’ont pas besoin non plus quand on les laisse travailler, aux immigrés qui ne voient pas la nécessité de demander un visa d’entrée à l’ambassade ou au consulat de France puisqu’il est plus rentable d’arriver les mains dans les poches et de toucher aussitôt des aides sociales qui les font plus riches immigrés-chômeurs en France que travailleurs dans leur pays d’origine.
Ce n’est pas bien sûr la seule réforme à faire, mais l’annonce de celle-là redonnerait courage et confiance à la France qui produit et qui aujourd’hui désespère en constatant son appauvrissement quand la fonction publique prospère malgré la crise nationale que nous vivons et qui s’aggrave.
Et puis, l’UMP devrait prendre garde. Avec un FN dont le programme économique et social est, depuis l’arrivée de Florian Philippot, proche de celui du Front de Gauche, ce qui diffère encore fondamentalement l’UMP du FN, c’est leur position sur l’Europe.
C’est l’Europe qui retient (encore) une partie de la droite de l’UMP de voter FN et MLP.
L’arrivée de Tsipras au pouvoir en Grèce a donné des idées à Marine Le Pen.
Tsipras s’est fait élire sur sa réputation d’homme qui allait mettre l’Europe à genoux ou la quitter, et puis arrivé au pouvoir, il a complètement retourné sa veste : il n’est plus question de quitter l’euro ou l’Europe, seulement de négocier la dette.
Qu’elle soit face au PS ou à l’UMP, Marine Le Pen, qui n’envisage pas d’alliance avec la droite de l’UMP sans laquelle elle n’obtiendra pourtant que des succès limités, n’accèdera pas à la présidence. Elle est intelligente et sait que quitter l’Europe et l’euro est possible, mais au coût d’une chute du niveau de vie français de l’ordre de 15 à 20 % qu’il faudra des années pour remonter et que personne ne lui pardonnera.
Alors, la tactique de Tsipras la tente : annoncer entre le premier et le second tour qu’elle négociera durement avec l’Europe mais sans la quitter, et sans sortir de l’euro. Une partie des électeurs FN râlera mais votera quand même pour elle, ainsi qu’une partie des électeurs UMP et même un petit pourcentage de socialistes et du Front de gauche…
Et dans ce cas, son élection serait assurée.
Maurice D.