Dans ses vœux à la presse, le président a annoncé une nouvelle restriction à la liberté d’expression. Benoitement, il l’a présentée comme une indispensable protection de la démocratie, et provisoirement limitée aux périodes électorales. Une loi est annoncée et l’on verra ce qu’elle interdit. Mais le président n’a pas défini ce qui peut être qualifié de « fausse nouvelle ». Il est donc à craindre que soit fausse nouvelle ce qui sera dit à l’encontre de la propagande gouvernementale. Nous assistons aux prémices de la mise en place du Ministère de la Vérité qu’imagina Georges Orwell dans son roman 1984, que reprend l’écrivain algérien Boualem Sansal dans 2084 où il imagine un monde islamisé avec un Ministère de l’Information Religieuse qui surveille l’application stricte de la charia en matière d’information.
Pour le moment, il s’agirait seulement d’encadrer la diffusion de l’information, donc la liberté de la presse, pour limiter la diffusion de « fausses rumeurs, confidences et autres informations ». Le problème est que le président lui-même consacre une partie de ses déclarations à diffuser de fausses informations…
Il dit un jour « Moi, je suis socialiste et je l’assume, et être socialiste aujourd’hui me paraît une nécessité de bâtisseur, parce que c’est croire qu’à certains moments de notre histoire, il y a une France qui se réveille, qui veut autre chose… » À ce moment-là, il était ministre d’un gouvernement socialiste. Sa soupe dépendait de ce genre de déclaration. Mais quand il est devenu candidat et a voulu ratisser large pour assurer son élection, il a déclaré exactement le contraire « L’honnêteté m’oblige à vous dire que je ne suis pas socialiste ». C’était au Puy-du-Fou où il était allé chercher la caution de droite de Philippe de Villiers. Laquelle des deux déclarations est une « fake news », une fausse nouvelle, un mensonge ? Et notez au passage qu’il assume qu’étant ministre des Finances, il n’était pas honnête !
Ce genre d’information contradictoire est fréquent dans les discours du Président, c’est la technique du « en même temps ». Elle permet de piéger les gogos et d’assumer un manque total de convictions politiques : il dit aux gens de tous les camps ce qu’ils veulent entendre, ses communicants lui ayant expliqué que les naïfs ne retiennent que ce qui leur fait plaisir et va dans leur sens. C’est d’ailleurs le principe moteur de sa communicante en chef, Sibeth n’Diayé qui, pour une fois franche, a déclaré « j’assume parfaitement de mentir pour protéger le président ».
Son comportement avec les journalistes est identique, quand il a besoin d’eux il leur fait des confidences, leur tape sur l’épaule et le ventre et s’en justifie : « Il faut sortir des petites phrases pour remettre les choses dans leur temps et dans leur contexte » ; quelques semaines plus tard, n’ayant plus besoin d’eux, c’est « Ni connivence, ni confidences, la proximité avec les journalistes n’est bonne ni pour le pouvoir politique ni pour l’exercice du métier de journaliste« . Mais « en même temps » il embauche à l’Elysée les journalistes les plus macronolâtres comme communicants sous les ordres de Sibeth N’Diayé la menteuse, et elle l’assume pour faire la propagande de son patron.
Le problème qui en résulte est apparu rapidement. Ayant l’intelligence d’un paillasson ou d’un lèche bottes, son équipe de communicants n’est pas performante et lui concocte des discours alambiqués et soporifiques, pleins de déclarations contradictoires. Que faire ? Il a trouvé la solution : faire taire ceux qui contestent ses affirmations à variation continue, d’où ce projet de loi.
En fait, nous sommes prévenus et les plus clairvoyants qui l’écoutent se posent tout de suite la question « à quel moment dit-il la vérité ? » et aussi « quelle vérité cache-t-il derrière ce mensonge ? » quand ils en ont détecté un bien gros. Et vous remarquerez que ceux qui, comme au Monde, mais aussi dans bien d’autres journaux, ne croient à aucune vérité cachée et traitent ceux qui les ont décelées de complotistes sont toujours du côté du pouvoir. C’est humain en un sens, ils tiennent à conserver leurs 7.500 € annuels d’exonération fiscale et savent bien que les journaux qui les emploient seraient en faillite sans les copieuses subventions du gouvernement. Même Marianne qui sous la houlette de son fondateur Jean-François Kahn, et qui fut un excellent magazine, a changé sa position : « Le goût de la vérité n’empêche pas de prendre parti ». Pour qui ? Le directeur de la rédaction, Renaud Dely, veille à ce que ce soit si possible le parti du pouvoir.
Trois groupes sont particulièrement acharnés à vouloir détruire ceux qui ayant le sens de l’observation, l’esprit logique et critique, contestent la « vérité officielle » : les abonnés au Monde, les chrétiens de gauche et les macrôniens. Ils ne supportent pas que la vérité puisse être autre que celle dont les abreuve Jupiter, leur dieu. Cela échappe à leur entendement. Quand on leur dit que tout n’est pas clair, qu’il y a un loup et que c’est flou, comme disait Martine Aubry, ils deviennent méchants et, comme le fait l’Élysée, disent que tous les gens qui croient à autre chose qu’à la vérité officielle sont de droite, et les affublent de noms d’oiseaux « lepénistes », « homophobes », « islamophobes », « racistes », « fascistes… » ou le pire de tous : « macronphobe ».
Dans les discours présidentiels et ministériels, la seule langue parlée est la langue de bois. Ils ne réalisent pas que c’est un puissant repoussoir pour toute une partie de l’électorat, notamment les abstentionnistes. Elle est enseignée sur les bancs de certaines grandes écoles comme l’ENA et Sciences Po. C’est le meilleur moyen pour un homme politique de cacher sa pensée, et surtout, la vérité. Elle permet d’affirmer la main sur le cœur qu’il y aura des baisses d’impôts pour tout le monde en 2018, alors que plusieurs organismes officiels ont calculé qu’il y aura globalement 4,5 milliards d’augmentation de la charge fiscale. Surtout, chaque fois qu’un impôt est baissé, la baisse est plus que largement compensée par des augmentations sur les taxes.
Elle permet d’affirmer aussi qu’il n’y a pas plus d’immigration qu’il y a trente ans alors que les statistiques montrent une augmentation annuelle constante et que les gens peuvent voir de leurs propres yeux que des banlieues et des villes entières sont contrôlées par des individus issus de l’immigration. Les politiques prêtent volontiers à la langue de bois des vertus qui la rendent nécessaire : elle permet de transformer, de réécrire ou cacher la vérité, de répondre à côté d’une question gênante ou de noyer une absence de pensée et de maîtrise d’un sujet sous un déluge de paroles creuses. Il s’agit souvent de faire appel aux sentiments pour dissimuler la carence de faits ou de connaissances concrètes. Bref, savoir s’exprimer sur tout sans être expert en rien. Elle permet de tromper le peuple et de le faire voter pour des intérêts qui ne sont pas les siens. Macron, entre autres, est un expert dans ce domaine.
Il faudrait pour éventuellement suivre Macron savoir ce qu’il entend par « fake news ». Il s’est bien gardé de le préciser. Il est à craindre qu’il en envisage l’interprétation comme l’obligation pour un journal, sous peine de subir le pilori, de ne rendre compte dans ses colonnes que de la parole « officielle » délivrée lors de ses conférences de presse.
Si la presse ne sert plus qu’à cirer les pompes présidentielles, elle doit comprendre avant qu’il ne soit trop tard qu’elle est définitivement morte.
Et si le président croit qu’il fera taire les blogs et la presse virtuelle du Net, il se trompe. À moins qu’il ne transforme la France en Chine ou en Corée du Nord, il ne réussira pas.
Le Monde a révélé quelques projets d’articles de la loi Macron en cours de rédaction. Les peines pour diffusion de fakes news pourraient monter à 3 ans de prison et 350.000 € d’amende, les « sources » pourraient être poursuivies comme l’auteur de la supposée fausse nouvelle, entre autres joyeusetés totalitaires.
Nous n’avons pas besoin de fous furieux pour réguler (afin de l’asphyxier) la liberté de la presse et transformer les journalistes en simples relais des communiqués de l’Élysée.
L’Imprécateur
LOI MACRON SUR LE CONTRÔLE DE L’INFORMATION…
Quelques exemples du projet de loi Macron, pas faciles à trouver, diffusés au compte goutte, notamment dans Le Monde mais la plupart passent inaperçus.
- Les plates-formes se verront imposer des obligations de transparence accrue sur tous les contenus sponsorisés afin de rendre publiques l’identité des annonceurs et de ceux qui les contrôlent mais aussi de limiter les montants consacrés à ces contenus.
- En cas de propagation d’une « fausse nouvelle », il sera possible de saisir le juge au travers d’une nouvelle action en référé qui permettra, le cas échéant, de supprimer le contenu mis en cause, de déréférencer le site, de fermer le compte-utilisateur, voire de bloquer l’accès au site Internet.
- Le CSA pourra lutter contre toute tentative de déstabilisation par les services contrôlés ou influencés par des États étrangers.
Macron, élu avec le soutien de quelques oligarques propriétaires des médias, comme feu Bergé, Niel, Drahi, et d’autres, veut s’assurer qu’aucune voix dissonante ne sera en mesure de lutter contre le verrouillage complet de l’information qu’il a entrepris.
Sans atteindre l’outrance des BFM et autres Échos qui présentent sa politique comme inspirée par l’Olympe, la plupart des grands organes de presse écrite ou audio-visuelle lui sont désormais soit entièrement acquis soit très bienveillants.
La manière dont le matraquage fiscal des Français en ce début d’année est escamoté, voire présenté comme une diminution des impôts, est tout à fait édifiante.
La reprise en main complète de l’audio-visuel public (« la télé »), pourtant déjà si obséquieux, va également bon train.
Il ne reste qu’à museler Internet, ce que Macron va tenter au prétexte de lutter contre les influences « étrangères » ou les rumeurs dites « fabriquées ».
Ceux à qui l’on serine depuis de mois que l’ouverture à l’international et les échanges sont par définition une bonne chose vont déchanter !
J’y vois une régression dramatique de la liberté de la presse, mais je pense que… 90% des journalistes et des Français s’en accommoderont.