Le débeurdinoir
A priori, ce mot ne vous dit pas grand chose… Vous êtes excusé. Il s’agit là d’un bien curieux endroit. Le premier des débeurdinoirs – « l’authentique » – fut le sarcophage mérovingien en forme d’autel de pierre érigé dans une église romane de l’Allier, où fut inhumé Saint Menulphe, moine irlandais du VIème siècle qui s’en revenait d’Italie, sur la route de son pays natal où il souhaitait finir ses jours.
La légende de Saint Menulphe
Sous le règne de Childebert (511-558), Saint Menulphe, anachorète reconnu fait évêque de Quimper par la grâce de Saint Corentin, épuisé par les fatigues de son voyage, fit halte au petit village de Mailly-sur-Rose aujourd’hui connu sous le nom de Saint-Menoux, non loin de Moulins, en Bourbonnais. C’est là qu’il mourut sans jamais avoir pu rejoindre l’Irlande. Pendant son séjour, Saint Menulphe avait pris sous sa protection un simple d’esprit, Blaise, souffre-douleur des villageois, dont il fit son serviteur. À la mort du saint-homme, son corps fut déposé dans un cénotaphe comme on en trouve encore dans certaines églises romanes primitives. On pratiquait souvent en ces lieux le désenvoûtement comme cure ultime avant l’exorcisme. Le nom de « Saint Menoux », emprunté au vocable de Blaise qui ne parvenait pas à prononcer correctement le nom du Saint, fut donné au village. Une abbaye de bénédictines fut créée au Xème siècle pour accueillir les pèlerins.
Terrassé par la mort de son protecteur auquel il vouait une piété filiale absolue, notre pauvre serviteur (appelé « beurdin » par les habitants alentour, mot signifiant « l’idiot du village » en patois bourbonnais) pratiqua une excavation dans le sarcophage où était inhumé Saint Menulphe pour le voir une dernière fois. Notre « beurdin » donc, entra sa tête dans le trou, sanglota d’abondance et pria avec ferveur. Mais… quand il se dégagea du sarcophage, il s’en trouva fort ostensiblement « débeurdiné », devant les villageois médusés qui se rendirent à l’évidence : Blaise n’était plus un beurdin !
Un miracle de plus au crédit de Saint Menulphe !
De l’utilité extrême du débeurdinoir
Les débeurdinoirs n’ont pas été fabriqués à la chaîne. À ma connaissance, il en existe un autre cependant, en l’église de Saint-Germain-en-Brionnais, village de Saône-et-Loire. De l’avis d’experts (auquel je me range humblement) ce sont là les seuls débeurdinoirs au monde. Pour le moment…
Mais réfléchissons un instant… Quelle sublime fonction auraient-ils aujourd’hui ! Rien de plus simple : pour « débeurdiner le beurdin », il faut et il suffit de faire s’agenouiller le drôle, et le contraindre à passer la tête dans l’orifice ad hoc. Sitôt le rituel accompli, le beurdin recouvre miraculeusement des facultés mentales à peu près acceptables, au moins dignes de celles dont font preuve aujourd’hui les dirigeants de notre pays.
Le saviez-vous ? – Il est encore aujourd’hui de fort nombreux beurdins !
D’ailleurs, le nom de « beurdin » est si bien porté qu’il s’est changé en patronyme, et il n’est pas rare de croiser en société Mme et M. Berdin ou autre Bourdin. Un concours de circonstances, me direz-vous.
Dites-moi si je fais une « bourde » !
Mais ce nom si populaire est devenu aujourd’hui la coquetterie d’hommes politiques, généralement des énarques, qui vont vous « apprendre à vivre ». Voire même, qui vont vous « apprendre à penser » comme de célèbres journalistes qui font l’opinion.
Gageons que si tous les beurdins de France se rendaient ensemble aux débeurdinoirs connus, les routes de l’Allier et de Saône-et-Loire seraient vite encombrées.
Attention ! De source confidentielle et protégée, il a été permis d’apprendre que les nouveaux locataires de l’Assemblée Nationale seraient « En Marche » vers Saint-Menoux. Le pèlerinage sera suivi par RMC. Devinez qui sera le commentateur…
Remarque importante : la débeurdinothérapie est aussi vivement conseillée à tous ceux qui avalent gloutonnement (et digèrent sans crampes d’estomac) le Journal de 20 Heures.
Luc Sommeyre
28/01/2018