En 1988, Jacques Attali alors gourou de François Mitterrand, recommandait de suivre le modèle économique grec. En 2000, il annonçait l’émergence imminente des deux superpuissances du 20ème siècle : l’Union Européenne et le Japon. Attali, Minc, Bernard-Henri-Lévy ont tous les trois conseillé tous les politiques de droite comme de gauche et produit un nombre impressionnant d’erreurs d’analyse et de jugement. Certaines ont eu des conséquences dramatiques, comme lorsque BHL fit un lobbying forcené en France et aux Etats-Unis pour pousser Nicolas Sarkozy et Barack Obama à intervenir massivement en Libye où, affirmait-il, Muhamar Kadhafi, rempart à l’immigration et à l’islamisme, empêchait l’émergence de la démocratie en réprimant une tentative de coup d’État et s’apprêtait à faire un bain de sang des révoltés islamistes.
BHL posant sur des barricades… en studio
On connaît le résultat : un chaos sanglant, le meurtre de Kadhafi et de plusieurs de ses enfants et petits enfants dans des conditions ignobles (sodomie à la baïonnette, yeux crevés…), le pays livré aux bandes armées tribales, le pillage des stock d’armes de l’armée libyenne à toutes les factions djihadistes d’Afrique du Nord, la déstabilisation consécutive de plusieurs États voisins, dont le Mali.
Cela n’empêche pas BHL de continuer à parader sur toutes les tribunes médiatiques et notamment Le Point, et comme beaucoup de brillants escrocs de la pensée il sait se faire facilement des amis et a sélectionné, entre autres, Manuel Valls auquel il prédit un immense avenir politique, ce dont il espère tirer personnellement un gros bénéfice futur.
Michel Onfray est un philosophe qui sait dire ce qu’il pense sans mâcher ses mots, une qualité rare de nos jours qui fait que, bien qu’il se revendique de gauche, je l’apprécie beaucoup tout en n’étant souvent pas d’accord avec lui. Le 25 février dernier, il a accordé à Le Point une interview dans laquelle il s’en est pris vertement aux trois gourous précités, Attali, Minc et BHL en disant qu’il préférait « une analyse juste d’Alain de Benoist à une analyse injuste de Minc, Attali ou BHL« . Alain de Benoist est un philosophe-journaliste classé très à droite bien que lui-même se dise « plus à gauche que Manuel Valls« .
« Là, Michel, tu as dépassé les bornes des limites » comme dirait le petit garçon qui dans une pub réprimande son poisson rouge qu’il accuse d’avoir mangé tout le chocolat. Manuel, l’impétueux, le fougueux et colérique hidalgo a bondi toutes dents dehors. Comment Onfray ose-t-il agresser son copain BHL alors que lui-même vient de prendre pour axe majeur de sa politique la dénonciation de l’immense danger que représente le FN pour la classe politique des privilégiés de la République ! « Quand un philosophe connu […], Michel Onfray, explique qu’Alain de Benoist – qui était le philosophe de la Nouvelle Droite dans les années 70 et 80, qui d’une certaine manière a façonné la matrice idéologique du Front national, avec le Club de l’Horloge, le Grece – […] vaut mieux que Bernard-Henri Lévy, ça veut dire qu’on perd les repères » (iTélé, Le Monde, Europe 1).
Manuel Valls ayant exhumé le dinosaure « Nouvelle droite« , me voilà contraint d’expliquer de quoi il s’agit : c’est un courant de pensée de la droite radicale né en 1968. L’étiquette « Nouvelle Droite » lui a été appliquée en 1979, à l’occasion d’une campagne de presse hostile. A l’origine, la Nouvelle Droite était pro-occidentale, anticapitaliste et antilibérale, favorable à l’unité européenne et défendait la culture gréco-latine et judéo-chrétienne. Elle s’est structurée autour de deux institutions principales : le Club de l’Horloge et le Groupement de recherche et d’études pour la civilisation européenne (Grece).
Pour Alain de Benoist, communisme et nazisme font avec le socialisme partie de la grande famille marxiste
On comprend que l’affirmation selon laquelle les idées de « ces gens-là » seraient plus « justes » que celles quelque peu nauséabondes de son ami BHL, qui sont pourtant l’illustration parfaite du mot « girouette », défrise notre Catalan national, mais pourquoi est-il monté au créneau alors que BHL aussi bien qu’Attali et Minc sont parfaitement équipés intellectuellement pour se défendre tout seuls ? La réponse saute aux yeux : Manuel Valls craint que l’étalage dans la presse des péripéties d’un conflit Michel Onfray contre les trois Curiace de la gauche, où les uns et les autres apporteraient des justifications pour défendre leurs idées, démontre finalement que Michel Onfray a raison : les idées de gauche sont très souvent injustes et celles de droite justes. Donc Valls a sauté à la gorge de Onfray, mais en oubliant une chose : quand on évoque des repères, encore faut-il dire lesquels.
Il s’en est expliqué : « dans ce moment-là, mon rôle, le rôle des formations politiques, c’est de faire en sorte qu’on comprenne quels sont les enjeux« . (« faire en sorte que » en jargon politicien signifie ici et en français « expliquer ») Il n’a pas tort Vallssounet, les électeurs qui doivent faire un choix dans quinze jours aimeraient bien qu’il leur soit dit et expliqué quels sont les enjeux de ce vote aux élections régionales, car pour le moment, c’est très obscur.
D’ailleurs, de façon plus générale, nous aimerions bien que l’on nous définisse quelles sont les « valeurs de la République » auxquelles se réfèrent sans cesse les politicards de gauche. La liberté citoyenne qui se restreint de jours en jours avec les directives de Cazeneuve et Taubira ? L’égalité mise à mal par la préférence administrative et politique accordée à l’immigration théocratique sur l’identité nationale laïque et républicaine ? La fraternité foulée aux pieds par les antifas et les racistes hurlant « mort aux Juifs » boulevard Barbès à Paris avec en tête toute la clique de la gauche néo-facho des Besancenot et Mélenchon ?
Les amis français de Bernard Cazeneuve
Ou, en remontant plus loin dans le temps, les colonnes citoyennes et républicaines du proto-nazi Thureau mandaté par Robespierre pour passer la Vendée au karcher, ouvrant des camps d’extermination, noyant des Bretons dans la Loire par bateaux entiers, entassant des jeunes femmes enceintes dans des pressoirs à raisin, pendant que Fouquier-Tinville faisait trancher les têtes de dizaines de milliers d’innocents comme dans le premier Etat islamique venu, qu’à Paris une boucherie débitait de la viande de nobles et une imprimerie tannait leurs peaux pour faire de jolies reliures aux livres des princes de la Première République qui, par leur goût prononcé pour le luxe et le profit, ressemblaient étrangement à ceux socialises de la Cinquième d’aujourd’hui ?
Ou bien parle-t-on à gauche de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Code civil napoléonien ? Allez, dites-nous, les citoyens de ce pays n’attendent que cela.
Michel Onfray n’est pas du genre qui baisse la tête quand on l’admoneste, il a répliqué : « Manuel Valls, l’ami de BHL, perd les pédales !… S’il faut une explication de texte à Manuel Valls (…) je disais que, moi qui suis de gauche, je préférais une idée juste, fût-elle de droite, à une idée fausse même si elle est de gauche, surtout si elle est de gauche. Quel philosophe, quel citoyen même, pourrait soutenir le contraire d’ailleurs, sauf à préférer l’erreur et le faux pour des raisons idéologiques ? » Et ce 9 mars dernier, il a tourné le couteau dans la plaie en déclarant sur Europe 1 au journaliste qui lui demandait ce qu’il avait à répondre à Valls prétendant avoir lu Alain de Benoist : « Je ne réponds rien du tout parce qu’il n’a rien lu du tout… j’ai vérifié dans le dictionnaire, ça s’appelle un crétin« , a lâché le philosophe avant d’expliquer ses propos : « ce n’est pas insultant, c’est familier« . Et il confirme dans un tweet qu’il élargit le qualificatif à Jean-Marie Le Guen, secrétaire d’État aux relations avec le Parlement, et à « la mafia qui se réclame de la gauche« . Plus il écrit, Michel Onfray en colère, plus je le trouve sympathique !
Cela dit, Valls a montré qu’il commet bien des erreurs, car Onfray n’a pas dit comme le prétend Valls que de Benoist « vaut mieux » que BHL, mais qu’il préférait les idées justes de de Benoist aux fausses de BHL et de la bande de crétins qui se gargarisent à longueur de livres et de colonnes de leur culture, surtout économique, largement frelatée.
Petit Robert : crétin, n. Idiot, goîtreux, imbécile, sot, stupide, atteint d’une forme de débilité mentale. Larousse encyclopédique : … atteint de roubles psychiques portant sur l’intelligence.
Maurice D.