AFFAIRE SKRIPAL : OFFENSIVE DES MONDIALISTES CONTRE LA RUSSIE
(Jean Goychman)

Il y a quelques jours, le Premier Ministre britannique, Theresa May, décidait l’expulsion de 23 diplomates Russes, afin de riposter contre l’assassinat d’un ancien espion russe vivant en Angleterre, oublié de tous depuis des années. Au-delà de l’affaire Serguei Skripal, on sent poindre une autre question concernant les rapports entre la Russie de Vladimir Poutine et certains pays occidentaux, pratiquement tous membres de l’OTAN. Certes, il y a des aspects qui pourraient laisser croire (du moins tels qu’ils nous sont présentés) que seul le Kremlin – en l’espèce Poutine – aurait pu perpétrer un tel crime.

Un espion qui n’en était plus un

Serguei Skripal

Examinons tout d’abord, la personnalité de la victime.

Serguei Skripal a été reconnu coupable de « haute trahison » envers la Russie en 2006. On lui reproche d’avoir été un « agent double » agissant pour le compte du Royaume-Uni de 1990 à 2000. Il est condamné à l’emprisonnement dans un camp de Mordovie. Il y reste 4 ans avant de bénéficier d’un échange de prisonniers qui lui permet de s’installer en Angleterre en 2010. Remarquons simplement qu’il n’avait pas été condamné à la peine de mort (ce dont on peut se réjouir pour lui). Pourquoi l’exécuter 12 ans plus tard ?

Un gaz à la provenance douteuse

Considérons le processus employé.

Le gaz innervant était, d’après les autorités britanniques, de la famille des « Novitchok ». Ces gaz, fabriqués par l’URSS entre les années 70 et 80, n’ont jamais été employés sur un champ de bataille. Or, cette famille comprend plus d’une centaine de gaz différents.

Depuis plus de 40 ans, après le chaos de la fin de l’Union Soviétique au début des années 90, comment peut-on être sûr que ces gaz sont toujours restés sous le contrôle des autorités militaires qui en avaient la garde, partout où ils étaient entreposés ?

Un lien avec les élections russes ?

Voyons aussi la date choisie et les victimes « collatérales ».

Tout le monde se souvient de l’assassinat d’Alexandre Litvinenko en 2006, empoisonné au Polonium 210, hautement radioactif. L’authenticité de la lettre posthume qu’il aurait rédigé peu de temps avant sa mort accusant Poutine n’a jamais été établie. La méthode employée l’avait ciblé, à l’exception de toute autre personne. On notera simplement que l’empoissonnement de Serguei Skripal et de sa fille date du 06 mars et la réélection de Poutine du 18 mars. Simple coïncidence ?

Retour vers la guerre froide ?

Au-delà de tout ce qui précède, un autre constat s’impose.

On perçoit actuellement une sorte de réminiscence de la « guerre froide » que l’on pensait disparue depuis plusieurs décennies. Or, l’histoire de cette guerre dite « froide » est indissociable de celle de l’OTAN. Les objectifs qui ont sous-tendu le traité ont été quelque peu perdus de vue. Rappelons-les brièvement :

« En fait, la création de l’Alliance s’inscrit dans un projet plus vaste s’articulant autour de trois objectifs : endiguer l’expansionnisme soviétique, empêcher le retour du militarisme nationaliste en Europe grâce à une présence forte de l’Amérique du Nord sur le continent et encourager l’intégration politique européenne »

Le rôle méconnu de l’OTAN

Ainsi donc, la mission dévolue à l’OTAN n’était pas, comme on a voulu le faire croire à différentes reprises et durant longtemps, de protéger les pays de l’Europe de l’Ouest contre une éventuelle attaque par l’Union Soviétique, mais aussi et surtout d’empêcher le retour du militarisme nationaliste en Europe par la présence américaine, et favoriser ainsi le fédéralisme européen.

En clair, cela signifie que l’OTAN était avant tout l’instrument de la disparition des États-nations européens par le transfert progressif de leur souveraineté vers un État supranational et fédéral.

De Gaulle s’y était opposé, d’abord par des sous-entendus à propos d’un « élément fédérateur » dont l’Europe serait dépourvue, puis s’interrogeant d’une manière faussement naïve sur le fait que l’éventuel fédérateur puisse ne pas être européen. Ceci n’est probablement pas étranger à sa décision de 1966 retirant la France du commandement intégré de l’OTAN. On peut simplement constater que c’est le président Sarkozy qui l’a remise 40 ans plus tard, en complément de la ratification par le Parlement du Traité de Lisbonne, qui n’était que le fameux traité constitutionnel que le peuple français avait refusé en mai 2005, rebaptisé pour la circonstance…

L’OTAN, bras armé des mondialistes ?

Mais revenons à l’actualité.

Qui est derrière l’OTAN ? En d’autres termes, que signifie « une présence forte de l’Amérique du Nord » telle qu’elle est mentionnée ? S’agit-il du gouvernement américain ? Du Pentagone ? À dire vrai, on ne sait pas vraiment. On sait simplement que l’OTAN est une « alliance » (terme assez vague) dont le secrétaire général Jens Stoltenberg est en place depuis 2014.

Homme politique, Stoltenberg a effectué différents mandats en Norvège. En 2015, il participa à la conférence annuelle du Club des Bilderberg, ce qui le place au cœur de la mouvance mondialiste.

Et c’est là tout l’enjeu de ce combat non-déclaré qui oppose ceux qui œuvrent pour implanter un gouvernement mondial à ceux qui entendent conserver l’esprit de la Charte des Nations Unies, notamment la souveraineté des peuples et des Nations, souvent désignés sous le nom de « populistes ». Après avoir fait disparaître le souverainisme populaire propre aux États-nation au profit d’un monde organisé par la haute finance internationale, représentée par un futur gouvernement d’experts.

Nous ne sommes plus dans l’ancien clivage du monde entre communisme et capitalisme qui marquait une frontière idéologique entre les partisans de la liberté (incarnés par les Occidentaux) et les tenants de la lutte des classes, censés se trouver de l’autre côté du Rideau de Fer. Cette représentation soigneusement entretenue faisait de l’OTAN le « défenseur des libertés » s’opposant à « l’Empire du Mal ».

La disparition de l’empire soviétique aurait dû, logiquement, entraîner la dissolution de l’OTAN.

Tel ne fut pas le cas et les interventions militaires effectuées sous l’égide de l’OTAN depuis une trentaine d’années montrent à l’évidence un changement de paradigme. En intervenant dans des conflits souvent nationaux, comme l’ancienne Yougoslavie, l’OTAN est devenu de fait le « bras armé » du gendarme mondial que sont progressivement devenus les États-Unis.

La montée des Populismes

De ce point de vue, l’élection de Donald Trump a manifestement changé les choses. Abordant le problème du financement de l’OTAN, il a mis le clan mondialiste en difficulté. D’autant que des clivages sérieux était apparu entre les nations européennes, menaçant à terme l’existence même de l’Union Européenne.

Georges Friedman

C’est en 2014 que le problème ukrainien est survenu. Georges Friedman (à l’époque patron de la STRATFOR) faisait en 2015, devant le chapitre de Chicago du CFR une conférence dans laquelle il expliquait comment et pourquoi les choses s’étaient passées. Il parle sans détour des buts poursuivis par l’OTAN en Europe, et du rétablissement d’un rideau militaire destiné à isoler la Russie du reste de l’Europe, et notamment de l’Allemagne. On peut penser que, derrière toutes ces manœuvres, il y a une tentative de « reprise en main » des peuples européens de plus en plus tentés par une « Europe des Nations et des Patries », inconciliable par nature avec le projet mondialiste.

Poutine devient gênant

Vladimir Poutine a réussi, contre toute attente, à remettre la Russie en position de « superpuissance » et, qui plus est, s’affirme de plus en plus comme un des leaders de ce vaste mouvement des peuples qui entendent conserver leur pleine et entière souveraineté. Sa position incontournable au Moyen-Orient, ses liens avec les pays « non alignés » comme la Chine ou l’Iran, commencent à sérieusement déranger ceux qui pensaient que, grâce aux différents traités de libre-échange qu’ils sont en train de généraliser, l’avenir mondialisé leur appartenait. Il restait à trouver un prétexte et un pays qui se dévoue pour passer à l’action. La Grande-Bretagne avait besoin de « redorer son blason » et son Premier Ministre étant quelque peu fragilisée, il y avait donc une sorte d’accord « gagnant–gagnant » cher à nos économistes néo-libéraux, pour qu’elle porte le premier coup.

On peut cependant constater que c’est un peu une tempête dans un verre d’eau, mais peu importe.

Ce qui compte n’est pas l’événement intrinsèque, mais le retentissement qu’on lui donne…

Et ce n’est pas quelques dizaines de diplomates quittant leurs ambassades respectives qui vont changer le cours des choses.

Vers le grand retour des nations ?

Mais nous n’en sommes qu’aux escarmouches. Il s’agit, comme disent les artilleurs, de « tirs de réglage ». Nous ne tarderons pas à voir dans quel sens les choses vont évoluer dans ce qui est, somme toute, un affrontement majeur puisqu’il met en jeu, à terme, l’organisation de notre planète.

Même si on peut penser que le mondialisme est, depuis quelques années, sur la voie d’un déclin annoncé, rien n’est encore gagné par les Populistes. Rappelons-nous cependant ce mot de de Gaulle :

« Les seules réalités internationales, ce sont les nations »

 

Jean Goychman
28/03/2018