L’EUROPE AU BORD DU
BLACK-OUT ÉLECTRIQUE ?

Cet été, l’Europe entière est passée à un cheveu d’un black-out électrique. Les mois de juillet et août chauds, secs et sans les vents aux vitesses nécessaires au fonctionnement des éoliennes partout à l’arrêt ont sollicité au maximum les interconnections intra-européennes à base de charbon, d’hydroélectrique, de gaz et de nucléaire. Il fallait alimenter coûte que coûte une surconsommation de ventilateurs et de climatiseurs, de frigos et de congélateurs.

Les citoyens de l’Europe de l’Ouest et du Sud n’ont pas pu en prendre conscience, le mot d’ordre étant partout de ne pas parler de la catastrophe qui menaçait pour ne pas compromettre la propagande en faveur de la transition énergétique, fer de lance de l’écologie. C’est l’une des raisons de la démission de Nicolas Hulot, parfaitement au courant de la panique qui menaçait chez les producteurs de courant. Il a compris que la transition énergétique qu’il portait allait dans le mur et il a pensé que s’il restait au gouvernement, il porterait plus tard la responsabilité de l’échec de la transition énergétique et de COP21. Les chasseurs n’ont été qu’un prétexte, à leur grande surprise d’ailleurs.

Seule l’Europe du Nord-Est a pris conscience du problème. Elle comptait sur l’hydraulique dont elle dispose normalement en abondance pour compenser le déficit nucléaire créé par la fermeture des centrales. Elle espérait ne pas être obligée, comme l’ont fait l’Allemagne et la Pologne, de relancer et rouvrir les centrales à charbon et lignite ultra-polluantes. Mais en raison de la sécheresse prolongée depuis le printemps, l’hydraulique était à sec dans tout le Nord-est européen.

Mine de lignite de Hambach en Allemagne

La réserve de lignite rhénane, dont la mine de Hambach fait partie, est le plus grand émetteur de CO₂ en Europe. Elle produit plus des poussières fines (de poussier) que trafic des voitures dans toute l’Allemagne.

La Norvège a appelé la Suède au secours, qui s’est tournée vers la Finlande, qui a répondu que ses centrales nucléaires en construction n’étant pas achevées, elle ne pouvait pas les aider. Tous se sont tournés vers l’Allemagne qui a fait tourner à fond ses centrales à charbon et lignite pour finir par appeler au secours la Russie et son gaz. Pour cette fois-ci, ça s’est bien terminé, mais le problème reste. Il suffira d’un hiver très froid ou d’un été très chaud pour qu’il revienne.

Les “luthériens” ne sont pas comme les Gaulois, réfractaires aux réformes, mais ils ont, comme les Gaulois, l’intelligence de savoir quand il faut y renoncer ou, au minimum, réformer la réforme. Tous remettent en cause la transition énergétique sur l’une de ses composantes essentielles : la réduction du parc éolien, et tous envisagent de commander de nouvelles centrales comme le fait déjà la Finlande. Ils ont enfin compris que le nucléaire est l’énergie la moins productrice de carbone, la moins chère, et paradoxalement la plus sûre à tous points de vue. Pour ne citer que les plus grands producteurs d’énergie (Chine, États-Unis et Inde) tous suivent la même voie.

Centrale nucléaire de Saint Laurent des Eaux, ne rejette que de la vapeur d’eau

Parce que tous dans le monde ont compris qu’un pays moderne a besoin d’une production d’énergie stable et permanente. Cela dit, quand on dispose d’une géothermie inépuisable comme l’Islande, d’un hydroélectrique permanent et presqu’inépuisable comme la Suisse, on peut se payer le luxe de limiter le parc nucléaire, mais pas nous.

L’Europe entière a compris, excepté là-bas, à l’Ouest, un petit pays qui résiste toujours avec son chef Macronix dressé sur son bouclier porté par Philipix et de Rugix. Ils s’obstinent à vouloir achever de détruire l’industrie nucléaire française qui fut la plus prestigieuse du monde pour dresser partout des centaines d’éoliennes géantes qui seront un tiers du temps à l’arrêt.

Cela dit, les spécialistes sont plus compétents pour vous faire comprendre le risque réel que nous prenons en nous obstinant à vouloir finaliser COP21 et la transition énergétique à la française.

La reproduction de l’article ci-dessous est autorisée par Contrepoints.


Par Michel Gay et Ernest Mund.

QUEL SERAIT LE COÛT D’UN « BLACK-OUT » DANS L’UNION EUROPÉENNE ?

Une fourniture d’électricité stable et permanente est essentielle au développement économique d’une nation et à son harmonie politique et sociale.

Or, la part croissante des énergies renouvelables intermittentes dans le système électrique européen augmente les risques d’un effondrement du réseau, ou black-out. Son coût financier et humain devrait être pris en compte dans toute décision concernant la production d’électricité en Europe.

Cette évaluation est complexe car il s’agit d’attribuer une valeur marchande à des pertes d’activités économiques (transport, télécommunications, accès à des banques de données…), mais aussi sociales (loisirs, spectacles, manifestations culturelles, etc.).

L’Energie Institut de la Johannes Kepler Universität à Linz (Autriche) a développé un outil intitulé Blackout-Simulator qui permet de calculer les conséquences macro-économiques d’une interruption de la fourniture d’électricité à l’échelle des 27 pays de l’Union Européenne jusqu’à un maximum de deux jours.

Les résultats fournis par Blackout-Simulator pour les deux exemples réels suivants permettent de prendre conscience des conséquences économiques importantes qui en résulteraient.

EXEMPLE 1 : BLACK-OUT EN ITALIE (SEPTEMBRE 2003)

Le dimanche 28 septembre 2003 à 03:20 du matin, l’Italie importe 6,6 GW d’électricité de France, de Suisse et de Grèce. Un incident sur une des lignes avec la Suisse aboutit à un effondrement total du système électrique en moins de 3 minutes.

Environ 56 millions d’Italiens sont plongés dans le noir, de la frontière nord du pays à la Sicile. Seules la Sardaigne et l’île d’Elbe échappent à l’événement.

Les régions situées au nord ont pu rétablir la situation les premiers via les interconnexions avec les pays voisins. Plus au Sud, le black-out a duré plus longtemps.

L’analyse de l’événement à l’aide de Blackout-Simulator conclut que la perte financière totale pour l’Italie s’élève à 1,18 milliard d’euros (Md€).

Ce bilan ne tient pas compte des effets collatéraux (stress, crises cardiaques, décès prématurés…) qui s’ajoutent, et dont il est difficile d’évaluer le coût.

La somme de 1,18 Md€ est donc une borne inférieure du coût réel de l’événement.

Ce black-out a fait l’objet d’un rapport technique de l’Union pour la Coordination du Transport de l’Électricité (UCTE).

EXEMPLE 2 : PERTURBATION EN EUROPE DE L’OUEST (NOVEMBRE 2006)

Cette « perturbation » n’a pas été un black-out mais elle a cependant conduit à des délestages qui ont duré jusqu’à deux heures dans plusieurs régions d’Europe de l’Ouest. Elle aurait pu rapidement dégénérer en un effondrement total du système électrique en Europe.

Dans la soirée du vendredi 3 novembre 2006 le système électrique européen est en équilibre global avec des disparités régionales de production et de consommation. La région Nord-Est de l’Europe produit davantage que l’Ouest (qui est donc en partie alimentée par le Nord-Est).

À 21:48, les deux lignes à 400.000 volts franchissant la rivière Ems en Basse-Saxe (Allemagne) sont coupées pour permettre à un paquebot de croisière de quitter un chantier naval pour rejoindre la mer du Nord. La puissance électrique circulant d’est en ouest ne peut donc momentanément plus emprunter ces deux chemins et s’additionne donc sur les autres lignes vers l’ouest.

Or, les valeurs limites de l’intensité autorisée sont rapidement dépassées, ce qui conduit à des coupures de lignes.

En quelques minutes, les automatismes de sécurité scindent l’Europe en deux, puis en trois régions. La région Ouest en surconsommation voit sa tension baisser avec un risque d’effondrement du réseau.

Le franchissement à la baisse du seuil de fréquence (49 Hz) déclenche une déconnexion automatique de plusieurs lignes à moyenne tension dans l’ouest et provoque des délestages (coupures) réduisant instantanément (et heureusement) la consommation de 15 à 20%.

Pendant ce temps, le démarrage rapide de moyens de production hydroélectrique en France (Tignes) et en Belgique (Coo) permet de ramener la production nécessaire pour stabiliser le réseau.

La situation redevient normale dans toute l’Union Européenne dans un délai de deux heures. L’UCTE a publié un rapport détaillé de l’événement en janvier 2007.

Les conséquences de cette « erreur » en Allemagne ont été ressenties entre l’Espagne et le Maroc en moins de deux minutes. Le réseau électrique maghrébin a été immédiatement sécurisé par la suppression de l’interconnexion.

LES CONSÉQUENCES SI…

Blackout-Simulator fournit par pays les résultats de la catastrophe qui aurait été celle de l’effondrement complet du système électrique de l’Europe de l’Ouest pour les 24 heures suivant l’événement.

LES CONSÉQUENCES DE L’ÉVÉNEMENT DU 04/11/2006 S’IL AVAIT DÉGÉNÉRÉ EN BLACK-OUT DE 24H

Pertes en milliards d’euros (Md€)

Md€
Allemagne 5,58
Autriche 0,47
Belgique 1,01
Espagne 3,07
France 4,87
Italie 4,25
Pays-Bas 1,31
Portugal 0,51

Le coût pour la Belgique aurait étéd’un milliard d’euros (Md€), de près de 5 Md€ pour la France, de près de 6 Md€ pour l’Allemagne, et d’environ… 21 Md€ pour les seuls huit principaux pays européens.

Les acteurs économiques ayant le plus à perdre lors d’un black-out sont (dans l’ordre décroissant) : l’immobilier, l’information et la communication, la finance, assurances et la construction.

Si l’événement s’était déroulé en semaine au lieu d’un vendredi soir, les coûts auraient été plus élevés d’environ 50% pour les mêmes secteurs (dans le même ordre).

C’EST PASSÉ PRÈS… ET MAINTENANT ?

L’effondrement total du réseau a été évité de justesse grâce aux délestages automatiques mais :

  1. les automatismes ne sont pas infaillibles ;
  2. à l’époque de l’événement (2006) le taux de pénétration des énergies renouvelables intermittentes (éolien, solaire) était beaucoup plus faible.

Or, la production éolienne joue un rôle déstabilisateur lors d’une crise du réseau électrique.

En effet, face à la baisse de fréquence en 2006, l’éolien a été automatiquement déconnecté (en dessous de 49,5 Hz) accentuant le déficit de production d’électricité, au lieu de produire davantage.

L’important taux de pénétration de l’éolien dans le réseau actuel accroît encore plus la fragilité du système dans les situations délicates.

Les 14 et 15 août 2003, un black-out dans le nord-est des États-Unis et le sud-est du Canada a affecté environ 50 millions d’habitants durant 48 heures. Les dommages économiques sont chiffrés aujourd’hui à 6 Md$ et l’événement provoqua le décès de 11 personnes. C’est à ce jour le black-out le plus grave observé en Amérique du Nord.

L’Europe de l’Ouest se prépare-t-elle à un black-out cauchemardesque pour plus de 300 millions d’habitants ?

Synthèse de l’étude : « Évaluation du coût d’un blackout dans l’Union européenne » d’Ernest Mund sur le site http://www.science-climat-energie.be/


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