Tête de liste des LR, François Xavier Bellamy, semble bien embêté. Remarquez bien, on peut le comprendre. Le Parti auquel il appartient et qui l’a mis à la tête de sa liste européenne s’est, depuis des décennies, volontairement cantonné dans l’ambiguïté. Héritier direct du gaullisme, du moins en apparence, jusqu’à la fin des années 80, ses dirigeants de l’époque, pour différentes raisons, ont décidé de s’allier avec un autre courant politique. Ce dernier, dirigé par Valéry Giscard d’Estaing, avait une vision différente de celle de Gaulle sur beaucoup de sujets. Cela n’avait pas empêché VGE de rester au ministère des Finances durant les années de Gaulle, de 1959 à 1966. Ce qui lui donnait l’apparence d’un « brevet de gaullisme ».
Une alliance risquée
Il faut dire que VGE, après la mort de Georges Pompidou en 1974, lui avait succédé à l’Élysée. Il y avait pourtant un candidat gaulliste face à lui, qui était Jacques Chaban Delmas. Mais ce dernier n’avait pas, en tant que Premier ministre, et en raison de son opposition marquée à Georges Pompidou, réussi à susciter l’enthousiasme des foules. Conseillé, ou plutôt « cornaqué » par le couple Garaud-Juillet, Jacques Chirac, alors ministre de l’Agriculture très apprécié des agriculteurs, décide de soutenir VGE qui, une fois élu, en fera son bref Premier ministre. Mais les deux hommes se voyaient en rivaux. En 1976, Chirac, après avoir démissionné, fonde le RPR sur une sorte de quiproquo. Nombreux sont ceux (et j’en fais partie) qui y avaient vu l’ombre tutélaire de de Gaulle et pensaient que le flambeau allait être en de bonnes mains et que ce nouveau rassemblement allait prendre le pas sur l’UDF, mouvement giscardien. Il n’en fut rien et les deux chefs furent battus par François Mitterrand en 1981 car les voix des électeurs chiraquiens ne se reportèrent pas toutes sur VGE au second tour.
Le nouvel échec de 1988 conduisit à un changement de paradigme. Il fallait jouer l’union entre le RPR et l’UDF. Oublié le « oui, mais… » d’avril 69, oubliées, les différences de fond sur l’Europe et ailleurs. Il suffisait de n’en point parler. Il y eut bien, ici et là, quelques récalcitrants nostalgiques de la France, souveraine et indépendante, écoutée dans le monde, telle que de Gaulle l’avait laissée, mais cela ne comptait plus. Pourtant, Jacques Chirac avait cru qu’il pourrait passer de Matignon à l’Élysée, grâce à une opportune « cohabitation » pour éviter une crise de régime. A l’expérience, ce fut pour lui un raisonnement « munichois ».
L’Europe, mais quelle Europe ?
Le référendum de Maastricht aurait du logiquement éloigner l’un de l’autre le RPR et l’UDF. Afin de l’éviter, un prudent silence fut gardé. Que nous étions loin de l’Appel de Cochin ! Quelques uns firent entendre une voix discordante, mais la majorité des dirigeants ne pipa mot. La France ne comptait pas devant l’Europe lorsqu’une élection présidentielle allait se jouer. C’est pour cette raison que le RPR (Rassemblement Pour la République), nom choisi parce qu’il rappelait aux plus anciens le RPF (Rassemblement Pour la France) allait être rebaptisé l’UMP (Union pour une Majorité Présidentielle) qui avait le mérite de la clarté. L’essentiel, c’était d’aller à l’Elysée. Si Paris valait bien une messe, l’Elysée valait bien un abandon de souveraineté. On passait sans le dire de l’Europe de de Gaulle à l’Europe fédéraliste, en attendant l’Europe mondialisée.
A la recherche d’un équilibre incertain sur un sol glissant
Après l’échec de Sarkozy en 2012, comme l’UMP n’incarnait plus la majorité ni présidentielle, elle fut rebaptisée « Les Républicains », ce qui ne veut pas dire grand’chose sur le plan des idées politiques, car tout le monde est républicain dans notre pays. Cela avait au moins l’avantage de ne froisser personne….
L’ambiguïté qui s’était instaurée alors perdure aujourd’hui. François Xavier Bellamy doit faire avec. Cela devient compliqué parce qu’une partie des centristes des LR ont rejoint (ou vont rejoindre) la République en Marche (après tout, ils sont tous républicains) et une autre partie est tentée de revenir vers une Europe des Nations et des Patries, plus conforme à leurs aspirations.
Le problème vient de ce que le Rassemblement National est également partisan sans ambiguïté de cette Europe des Nations, et ceci depuis très longtemps.
Il faut donc que FX Bellamy se glisse subrepticement entre le fédéralisme de LaREM et le souverainisme du RN. S’il penche du coté de l’Europe des Nations, il risque de perdre les centristes et s’il s’approche de l’Europe fédérale, ce sont ses électeurs de droite qui vont être attirés par le vote RN.
La réponse provisoire que Bellamy apporte est de dire urbi et orbi que le RN est « europhobe » et veut sortir de l’Europe, pensant ainsi probablement dissuader ceux qui seraient tenter de voter pour lui.. Il va devoir trouver autre chose car peu de gens, en vérité, se laisseront influencer par ce discours en contradiction avec la réalité. Car même si François Xavier Bellamy met beaucoup de conviction dans ses propos de campagne, il traîne derrière lui une « queue de comète » fédéraliste en tant que tête de liste d’un parti qui a, depuis 1992, toujours milité pour cette Europe supranationale, aux antipodes de la vision gaullienne de ce que pouvait être l’Europe des Nations.
Pire encore, comme disait François Mitterrand, orfèvre en la matière : « les vieux péchés ont de longues ombres » et beaucoup se souviennent du camouflet infligé au peuple français lorsque le référendum du 29 mai 2005 fut transformé, par un tour de passe-passe constitutionnel, en traité de Lisbonne.
Tout ceci, à la longue, finit par avoir un coût électoral que la liste LR risque de payer.
Jean Goychman
18/03/2019
S’il ne sait pas trouver sa place , c’est qu’il n’en a pas ..c’est aussi simple que cela !
Le poisson Bellamy n’est pas dans le bon bocal. Avec Marion au RN il aurait eu plus de succès que chez LR
Au lieu de « succès » lire « influence ».