PETITES CAUSES, GRANDS EFFETS ET PERTE DE SOUVERAINETE ( Jean Goychman )

Il y a cinquante ans, le 03 janvier 1973, alors que la France se remettait des excès de la « trêve des confiseurs » et que les Français se présentaient mutuellement leurs vœux pour cette année naissante, une loi était promulguée dans une discrétion totale. Pourtant, cette loi, présentée comme insignifiante, simple régularisation d’une pratique rentrée dans les mœurs, est à l’origine de la perte de souveraineté de notre nation en la mettant sous la coupe des « marchés financiers ».

 

Loi de 1973, Jacques Cheminade répond aux décodeurs du Monde

 

 

UN TEXTE ABSCONS, REDIGE DANS UN JARGON D’INITIES

Que dit ce texte de loi ?

Pas grand-chose, mais un pas grand-chose lourd de conséquences. Pierre-Yves Rougeyron, dans son livre « Enquête sur la loi du 03 janvier 1973 » (éditions Le jardin des livres) parle même de « la pire trahison de l’Histoire de France. En interdisant au Trésor Public de pouvoir « présenter ses effets à la Banque de France », cette loi allait tout simplement obliger le Trésor Public à emprunter auprès des banques privées l’argent nécessaire au financement du déficit budgétaire de la Nation.

Dans l’immédiat, cela n’avait aucune importance puisque le budget était pratiquement à l’équilibre depuis 1958, comme l’indique le graphique suivant :

 

 

 

 

 

 

On voit que les premiers déficits apparaissent seulement en 1975 et se sont constamment accrus depuis. Quelle était leur cause ? Le manque de rigueur budgétaire ? Peut-être. Mais surtout le fait que les sommes d’argent empruntées par le Trésor Public l’étaient en contre-partie d’intérêts à verser sur ces sommes, ce qui, avec recul, augmentait les dépenses, alors qu’avant cette loi, aucun intérêt n’était prélevé par la Banque de France sur ces sommes émises en contrepartie de « bons du Trésor » Cela rappelle assez singulièrement la situation des colonies anglaises aux États-Unis. Dans un récent article, je citais la phrase de Benjamin Franklin, répondant au gouverneur de la Banque d’Angleterre qui l’interrogeait sur la raison de la prospérité de ces colonies :

 

 

« C’est très simple. Aux colonies, nous émettons notre propre monnaie. Elle s’appelle l’effet colonial. Nous l’émettons en proportion des besoins du commerce et de l’industrie pour faciliter l’échange des producteurs aux consommateurs. De cette manière, créant nous-mêmes notre propre monnaie, nous contrôlons son pouvoir d’achat, et nous n’avons pas d’intérêt à payer à quiconque » 

Evidemment, le gouverneur ne pouvait tolérer que ce pouvoir d’émission de la monnaie coloniale échappe à sa banque. Une loi fut adoptée, interdisant cette pratique. La conséquence fut une crise économique qui se traduisit par le soulèvement des colons américains et le début de la guerre d’indépendance de 1775.

ALIGNER LA BANQUE DE FRANCE SUR LE MODELE DE LA FED

C’était le véritable objet de cette loi. Il s’agissait surtout de rendre la Banque de France totalement indépendante du pouvoir politique, comme l’est la Réserve Fédérale américaine depuis sa création.

C’était une condition nécessaire à l’intégration européenne qui, tôt ou tard, passerait par une union monétaire sur une monnaie commune, destinée à devenir unique, tout comme l’est le dollar sur le sol des États-Unis. Par ailleurs, le dollar étant devenu en 1944 monnaie « de réserve internationale », il y avait fort à parier que ce dernier serait utilisé pour les emprunts faits par les États et notamment la France.

Alain Peyrefitte rapporte ce mot de de Gaulle, au sujet des pratiques de la FED :

« Nous payons les Américains pour qu’ils nous achètent » (C’était de Gaulle Tome3 1992 De Fallois)

Nous sommes là au cœur de ce système qui, après avoir fait du dollar une monnaie mondiale, puis l’avoir déconnecté de l’or, a donné à ceux qui contrôlait son émission, un pouvoir quasiment sans limite. N’oublions jamais que ce dollar est une monnaie émise contre de la dette et que, dans ce système, la dette produit des intérêts sur de l’argent qui n’a pas de réalité économique, puisque créé à partir de rien.

Certes, en 1973, notre monnaie était toujours le Franc, mais le « serpent monétaire européen » était entré en vigueur en 1972 et que les monnaies européennes étaient liées entre elles. Donner à la Banque de France, comme cela était déjà le cas de la plupart des banques européennes, une indépendance totale par rapport au pouvoir politique, du moins en ce qui concerne le contrôle de la monnaie, marquait la suprématie de la finance par rapport au politique.

LA FIN DE LA SOUVERAINETE NATIONALE

On peut objecter, après tout, qu’un pays bien gouverné (je n’aime pas le terme « géré ») doit avoir un budget en équilibre et que, si tel n’est pas le cas, il doit soit emprunter , soit  créer de l’argent.

Dans ce dernier cas, cela revient à transformer la dette en inflation et l’exemple sempiternel est celui de l’Allemagne en 1923. C’est un peu court, car l’inflation « mange la dette » et c’était bien le but recherché par l’Allemagne dont les réparations de guerre avaient été libellées en marks. Plus le Mark se dévaluait et moins il restait à rembourser. La grosse différence est que, lorsque nous empruntons de l’argent auprès des banques privées, nous devons payer des intérêts alors même que cet argent est créé sans rien coûter à ceux qui nous le prête. Ces intérêts viennent augmenter le déficit budgétaire et le phénomène de « boule de neige » s’enclenche.

Entre 1974 et 2022, notre dette publique est passée d’environ 3 % du PIB a environ 120 %.

Dette publique de la France depuis 1995

Il est difficile de contester le point d’inflexion du graphique à la fin des années 70 qui correspond à l’application de la loi. Il faut également souligner que le Traité de Maastricht imposait à tous les pays membres de la future zone « euro » des «critères de convergence » un ratio dette/PIB inférieur à 60 %… Ceci explique peut-être cela ?

UN OBJECTIF BIEN CACHE

Roosevelt disait qu ‘en politique « rien n’arrive par hasard » et que chaque événement est toujours relié à un projet qui, lui, reste généralement caché. La loi de 73 ne fait pas exception à cela.

Le projet global, tel qu’on peut le discerner aujourd’hui, était d’établir une domination des peuples par l’endettement public. Le projet « européen » remonte loin dans le temps, et il s’intégrait à un projet beaucoup plus vaste, qui concernait visiblement la planète entière.

Aujourd’hui, le réseau des banques centrales qui fonctionnent sur ce principe compte plus de 150 établissements répartis à la surface de la planète.

Stephen Midford Goodson, dans son livre « Histoire des banques centrales et de l’asservissement de lhumanité » (publié en 2016 éditions Omnia Veritas) et dans lequel il dénonce le danger  de ce système pour les peuples, leur souveraineté et leur indépendance, conclue ainsi son introduction :

« La solution est simple et évidente. Si nous voulons reprendre notre liberté et conserver notre souveraineté hors de l’esclavage imposé par les banquiers privés, devons démanteler leur système bancaire de réserves fractionnaires et le réseau formé par les banques centrales, faute de quoi nous serons nous-mêmes détruits et condamnés à l’oubli »

Jean Goychman

20 janvier 2023

5 Commentaires

  1. Pour une fois (une fois n’est pas coutume) je ne suis absolument pas d’accord avec cette analyse, mais il me faudrait produire une réponse longue et fastidieuse. Disons simplement que de 1958 à 1980 les budgets étaient équilibrés, voire en excédent, et que chaque crise majeure (mai 68 sous De Gaulle, première crise du pétrole sous Pompidou, en 73 et seconde crise du pétrole en 79 sous Giscard, les gouvernements successifs (en particulier lorsque Giscard était aux finances ou Barre à Matignon) ont tout mis en œuvre pour revenir à l’équilibre. En outre nous avons à cette période découvert l’importance d’avoir une monnaie crédible et pour cela une Banque Centrale indépendante. Nous n’étions plus une république bananière qui manie sa monnaie à son gré.
    Notre effondrement n’a rien à voir avec cela, car nous payons depuis 1981 quarante ans de laxisme budgétaire, de déficits devenus abyssaux… Notre dépendance « à la finance » ne vient pas de l’indépendance de la Banque Centrale mais de l’incurie, l’incompétence, des politiques économiques et des choix stratégiques opérés sous les cinq derniers présidents de la cinquième république.

    • Cher Eric, vous êtes tout à fait libre de voir les choses ainsi.
      Cependant, difficile de penser que ceci n’est dû qu’au laxisme de nos gouvernants. Le « choc pétrolier » était prévu depuis longtemps et le discours de Nixon (imposé par la FED) ne servait qu’à déclencher la montée du prix du baril afin que la FED puisse créer de la dette sans limite.(petrodollars)
      Kissinger à dit que lui même avait exigé de l’OPEP de multiplier par 4 le prix du baril en 1973 et c’est ce qui a été fait (sauf pour les USA qui le payaient 6$ au lieu de 12)

  2. Il s’agit d’un mécanisme qui est mis en place patiemment et méticuleusement avec une grande quantité de complices actifs.
    Ils ont eu tout leur temps. Ils ont pu faire des tests sur les populations pour voir le niveau de réaction et faire varier la vitesse de progression.
    Ceux qui observent, analysent et alertent sont ostracisés et écartés des moyens de décision ou d’information.
    J’ai tiré le fil du mensonge a écrit Philippe de Villiers, ses révélations ont soigneusement été écartées des médias.
    Au cas où vous seriez passé à côté, avez-vous un jour examiné avec une très forte loupe (loupe de bijoutier ou binoculaire de labo, ou super scanner) les lignes de vos chèques, là où vous écrivez la somme ?
    Vous y trouverez un extrait de la déclaration de Robert Schumman du 9 mai 1950.
    Aucun chèque d’aucune banque n’y échappe.
    C’est un détail insignifiant.
    Insignifiant ?

    • Après la peur du COVID, ils vont bien nous trouver autre chose pour nous faire taire. Mais, voilà il y a des réfractaires qui ne veulent pas se taire. HEUREUSEMENT !. Quant à l’électricité, les gens qui ont acheté des voitures totalementé lectriques le constatent sur leurs premières factures : le coût des recharges a déjà été multiplié par 3 ! Cela fera comme pour le diesel. Il y a 20 ans, les gouvernemùents vous poussaient à acheter des voitures diesel … jusqu’à ce que celui-ci soit considéré comme dangereux ! Qu’en sera-t-il des voitures électriques quand on voit que nombre d’incendies se déclarent subtement (elles sont d’ailleurs ointerdites de parkings souterrains : pourquoi ?) y compris les bus et autres engins ! Nous sommes gouvernés par des gens dangereux , dangereux pour notre santé, dangereux pour la planète ! mais voilà ! i y en a qui continuent de voter pour eux ! Il faudrait qu’il leur arrive un incident ou un acident sérieux pour qu’ils comprennent. Genre l’affaire Dupont-Moretti du oment ! Et il ose dire qu’il est « dévasté » alors qu’il n’appelle même pas sa belle-fille autrement que par la « femme » en question ? Minable !

  3. Finalement, et depuis des années, tout semble s’imbriquer, patiemment, comme les pièces d’un puzzle conçu savamment mais diaboliquement. Mais quel genre de révolution générale des peuples serait capable de briser ce système, quand on est incapable de s’entendre ds les grandes institutions internationales puisqu’à tout moment, ces dernières sont bâties sur le même système et ds le même but de la domination de la Finance?

Les commentaires sont fermés.