Nous vivons une drôle d’époque où tout devient si compliqué qu’on y perd son Latin. (Cette remarque ne concerne pas les curaillons progressistes de l’Eglise postconciliaire, qui eux ne l’ont jamais appris, mais ceux qui, l’ayant appris, doivent céder aux oukases de Bergoglio qui ne veut plus de messe en Latin).
Fermons la parenthèse pour vous narrer ce qui motive ma remarque.
Figurez-vous que, dans mon fief perdu de Lozère, j’ai de nouveaux voisins. Ils ont racheté pour une bouchée de pain une vielle masure qui servait autrefois de bergerie, avant que l’Union Européenne ne tue l’élevage de moutons français au profit d’ovins chinois car ces derniers, moins chers, grèvent moins le budget des classes populaires qui sont de plus en plus nombreuses à faire l’Aïd-el-kébir et l’Aïd-el-fitr. Depuis, en basse Cévenne, les éleveurs crèvent de faim mais ce n’est point nouveau. Feu mon père disait jadis que, chez nous, « les corbeaux volent sur le dos pour ne pas voir la misère » et que « même après les moissons, les rats descendent des greniers avec les larmes aux yeux ». Nous sommes une région pauvre, ce qui explique sans doute ce besoin de nous taper dessus entre « papistes » et « parpaillots » car il faut bien tuer le temps quand votre ventre est vide.
Mon pays, c’est une contrée perdue dont les montagnes s’appellent l’Aubrac, la Margeride, l’Aigoual et le mont Lozère. Quelques ruisseaux y serpentent parmi les plateaux désertiques et les bruyères sauvages. Dans ces coins retirés du monde, les hommes s’efforcent, depuis toujours, de survivre non sans peine mais libres, à l’écart du monde, « des gendarmes et des lois ». Terre de refuge pour les Templiers pourchassés par les argousins de Philippe le Bel, pour les Cathares traqués par l’Inquisition, pour les Camisards puis, plus récemment, par les maquisards, elle reste l’un des derniers asiles pour ceux qui refusent de devenir des « moutons de Panurge » en cédant aux sirènes du progrès, des tendances et de la modernité.
En Cévennes, en dehors de la période estivale où la région appartient aux touristes, on vit – mal ! – de l’élevage et des fromages. On cultive quelques champs de seigle, on nourrit de châtaignes un cochon – LE cochon – que l’on tue en hiver. On habite de grandes fermes, fortifiées parfois, pour se protéger de l’envahisseur ; l’hiver, on y grelotte autour d’un maigre foyer, l’été elles sont sombres et fraîches comme un puits. Les gens de chez nous sont avares de leurs deniers et de leur parole.
Dans un temps, pas si lointain, maîtres et domestiques mangeaient à la même table, en silence, servis par les femmes qui restaient debout. C’est vous dire que les inepties comme la lutte des classes et le féminisme, ici, on s’en fout comme d’une guigne.
Les Cévenols sont orgueilleux mais sans suffisance, mystiques, réalistes, économes voire pingres sauf de leur peine et de leur sang, accueillants et méfiants à la fois.
Les auteurs régionaux, de l’austère André Chamson, chantre du protestantisme cévenol, au conteur Jean-Pierre Chabrol, tous décrivent avec leurs mots des hommes rudes, souvent pauvres, mais amoureux des grands espaces et épris de liberté. Cette terre, c’est la mienne, une enclave de liberté au sein du Royaume corrompu, liberticide et décadent du Marquis Emmanuel de Morveux d’Enarque et de sa clique d’incapables qui pillent et rançonnent le pays au profit de la Reine Ursula Von der L’Hyène et sa Cour de parasites aussi incompétents que malhonnêtes.
Il y a quelques années, chez nous, les masures et demeures délabrées étaient achetées par des Hollandais. Des grands dépendeurs d’andouille, blancs comme des navets, tristes comme des bonnets de nuit et dont les femelles, pourtant grandes et blondes comme les blés, n’appelaient point à la bagatelle tellement elles semblaient frigides. Ces gens-là vivaient entre eux et ne faisaient rien pour s’intégrer. Ils ne faisaient rien non plus pour faire vivre le commerce local. Ils se nourrissaient de Boulgour, de Quinoa et autres légumineux « oubliés » et redécouverts depuis que la mode écolo-bobo sévit un peu partout. Pour être franc, quiconque a gouté ces légumes « oubliés » comprend vite pourquoi ils ont été oubliés.
Nous, on se nourrit de charcutaille, de châtaignes, de patates, de fromages de chèvre, et on boit notre vin qui n’est point « une horrible piquette… qui faisait des centenaires, à ne plus que savoir en faire, s’il ne vous tournait pas la tête » comme chantait jadis cette crapule stalinienne de Jean Tenenbaum, dit Jean Ferrat (qui était cependant un excellent troubadour).
Avec les Bataves, point n’était besoin de forcer ma misanthropie naturelle.
Ils sont généralement huguenots or je suis né « papiste ». On m’a appris, dès mon plus jeune âge, à me méfier des adeptes de « la religion prétendument réformée ». De plus, je ne parle pas leur langue ou, plus exactement, ils ne parlent pas MA langue car, après tout, ils sont chez moi.
Et qu’on ne vienne point me taxer de « xénophobie » ; ce mot vient de Xénos : l’étranger et Phobos : la peur, or ils ne me font pas peur, ils me feraient plutôt pitié ces grands échalas mal nourris et pâlichons, surtout quand je les vois suer sang et eau sur leurs vélos et que je me fais un plaisir de les enfumer en les dépassant avec mon vieux 4×4 diésel.
Mais revenons à mes voisins.
J’étais tranquillement au chaud chez moi quand mes chiens ont aboyé dans la cour. Comme notre région attire de plus en plus de Manouches, Gitans et autres voleurs de poules, j’ai trois chiens de garde. Un Berger allemand, une bête noble, puissante, attachée à son maître et qui vit avec moi, dans la maison, et deux corniauds qui vivent dehors en permanence, quelle que soit la saison : un grand bâtard au poil épais, fort en gueule mais qui ne mord pas, appelé Mélenkon, et un petit fox-terrier bâtardé, avec un aboiement de fausset, nommé Makron. Ces deux chiens ne servent à rien sinon à m’avertir de l’approche d’un visiteur. Ils occupent leur journée à larver, à bâfrer ou à se sodomiser mutuellement. Quand ils aboient, on dirait un klaxon deux tons, l’un grave, l’autre aigu.
Ce soir là, j’étais devant ma cheminée et je sirotais un whisky « single malt » dont je suis fort friand. Je dois en effet vous avouer que j’ai trois points communs avec les lointains Ecossais : une radinerie légendaire mais non usurpée ; un goût pour le (bon) whisky ; et la haine de l’Anglais à qui je ne pardonne pas Jeanne d’Arc, Fachoda et Mers-El-Kébir… entre autres.
Mes chiens ont aboyé et j’ai saisi mon espingole calibre 12. Elle est en permanence chargée au gros sel mais je garde sous la main quelques cartouches de « double-zéro » au cas où l’intrus serait malveillant, on ne sait jamais. Contrairement au reste du Royaume, où la légitime défense consiste à se faire occire sans riposter, en Cévennes, elle commence quand quelqu’un entre chez vous sans y être invité. Mais ce jour-là, point de danger ! J’ai vu arriver un mâle et une femelle de cette engeance étrange qu’on appelle « Bobo ». Lui, épais comme un casse-croute de chômeur, le poil long et sale, avec une ridicule queue-de-cheval. Un chapeau déformé sur la tête, habillé d’une veste chiffonnée et d’un « jean », il était chaussé de mocassins sans chaussettes. Elle, plate comme une limande, la fesse triste, avec des formes qui s’inspiraient plus du cercueil que de l’étui à violoncelle, attifée comme l’as de pique et chaussée, elle aussi, de mocassins sans talons.
Quand on voit un tel couple de dos, on se demande qui est l’homme et qui est la femme. De face on identifie le mâle simplement parce qu’il est rasé avec une biscotte. A première vue, on les prendrait pour des clodos mais on me dit que je suis un plouc, un rustre mal dégrossi, car dans les grandes villes, on appelle cette façon de s’habiller « le froissé chic » car, quand on brasse des idées de gauche, il est important d’avoir l’air pauvre.
Mes nouveaux voisins se sont présentés : « Jordan et Jane ». C’est une manie de Bobo de ne pas donner son nom de famille, comme s’ils en avaient honte.
Bon, je ne suis pas totalement sauvage, je les ai invités à prendre l’apéro. J’ai annoncé ce que je pouvais leur offrir : « Whisky, Ricard ou vin des Gorges du Tarn… » et j’ai posé sur la table un morceau de jambon, un saucisson et mon « Laguiole » qui coupe comme un rasoir. Jordan a pris l’air contrit d’un gamin surpris en train de se masturber en cachette et m’a dit « C’est très sympa mais je suis végétarien, quant à Jane, elle est carrément végane ; elle pense à la planète ».
Je leur ai donc offert un verre d’eau et une gousse d’ail, puis nous avons entamé une discussion un peu… surréaliste :
Elle : « Elle est super votre ferme fortifiée. Vous l’avez achetée il y a longtemps ? »
Moi : « Elle est dans ma famille depuis le 13ème siècle, et elle est restée dans son jus. »
Lui : « Pourtant votre nom n’est pas de la région non ? »
Moi : « C’est l’ancien nom de la Vallée Française. Saint-Etienne-Vallée-Française s’appelait jadis Saint-Etienne-de-Valfrancisque. Il est difficile de trouver patronyme plus cévenol… »
Puis Jane a repris la parole. Son homme, que j’ai supposé « déconstruit » se contentant d’opiner du chef (ce n’est pas une contrepèterie) avec un sourire idiot. Mais c’est de ma faute, au lieu de me débarrasser prestement de ces deux emmerdeurs, j’ai eu l’idée saugrenue et stupide de leur demander : « Qu’est-ce qui vous a amené dans notre région ? ».
Elle m’a tout raconté :
« C’est la pandémie de Covid 19 qui nous a fait prendre conscience de ce qu’étaient nos vies. Moi, je suis dans l’enseignement ; j’ai fait un « flash-back » sur mes années dans les transports en communs. Je suis du genre « cool » mais Jordan il est plus « speed ». Il travaillait dans une « start-up » et, comme « job » c’est pas facile. Comme il était « webmaster » avec des responsabilités de « manager » il était souvent en réunion : en « brainstorming » en « débriefing » ou en « reporting » du mois précédent. Une vie de fou et pourtant, de nos jours les « computers » ne sont pas bruyants mais avec des bureaux en « open space », c’est dur. Dans sa boite, il n’avait pas de « smoking place ». Pour déjeuner avec ses collègues, toujours à la bourre, un « burger » vite fait au « food truck » installé en face de la boite. Souvent, il repartait avec un « doggy bag » pour finir son déjeuner au travail. Il animait une « hot line » pour des « traders » qui suivent le « market trade » et consultent en permanence leurs « followers ». Il quittait son bureau tard, et me passait un coup de « smartphone » pendant que je faisais du « shopping » au « hard-discount » du coin. Nos seuls loisirs en commun, c’était nos achats pendant le « black Friday », et nos séances de « fitness » où on faisait du « home training » en « indoor » avec notre « coach » personnel.
En région parisienne, y’a que le « week-end » qui était « cool ». On faisait du « jogging » ou un « trail » si on était en forme. Là, moi j’aimais bien rester en « sportswear » et faire un « brunch » à midi. Et l’après-midi, « home cinéma » dans notre « living » très « cosy », notre seul moment de « cocooning ». On aime écouter de la musique en « play list » et nos émissions préférées en « replay » (ou la radio en « podcast »). Avec le « job » de Jordan c’était rare de voir une émission en « prime time ». On se faisait quelquefois une vidéo en « streaming » ou en VOD « on demand »… On aime beaucoup la musique mais les concerts, on les préfère en « live » ou « unplugged ». Moi, c’est rare que j’achète encore des « singles » de mes chanteurs préférés. En fait, Jordan et moi, nous sommes du genre très « cool ». J’aime bien être habillée « fashion » mais tendance « vintage » tout en restant « in »… Je me suis mis en disponibilité, « Bye-bye » le lycée… ».
Je n’en pouvais plus de ce charabia aussi jargonnant que déconnant, alors j’ai posé une autre question :
« Dites-moi madame, vous étiez enseignante en quelle matière ? »
Et elle m’a répondu sans se troubler:
« J’étais prof de Français… ».
L’hiver est passé là-dessus, un hiver rude comme toujours en Cévennes. La Tramontane et le Cers, nos vents qui, en cette saison, charrient des nuages aussi noirs que l’âme d’un damné, ont fait comprendre aux Bobos parisiens que la terre cévenole a horreur des intrus.
Ils sont partis, ouf !!!!
Cédric de Valfrancisque
16 février 2023
Merci ,Monsieur de Valfrancisque pour ce merveilleux article. Un lecteur qui souffre de la destruction de la France par nos élus ,nos énarques, nos immigrés qui nous haïssent et veulent détruire notre culture….
J’ai tout d’abord pensé qu’un CADA projetait de s’installer près de chez vous.
Fausse alerte, mais vous ne perdez rien pour attendre. Ces enragés qui veulent installer de l’exotisme dans nos campagnes, maintenant que les villes sont bien pourries, ne vont pas lâcher le morceau à notre première demande. À nous d’être plus déterminés voire agressifs.
Monsieur de Valfrancisque, vous écrivez trop bien. Vos expressions sur les « rats qui pleurent » et la description de vos chiens m’ont tordu de rire. Vous êtes aussi une personne que j’aimerais rencontrer et à qui je serrerais volontiers la main. La Lozère me fascine de beauté et de paysages sauvages, notamment le Gévaudan. Je suis originaire du Bourbonnais, du sud de la forêt de Tronçais ; « ma » forêt. Je n’ose espérer que vous me contacterai.
Il m’arrive de passer en Lozère à la belle saison pour me rendre dans la maison familiale de ma belle famille en Brière, non loin de Saint Nazaire en Loire-Atlantique où les gens sont comme les gens de Lozère. Une belle région de paix également.
Quant aux bobos débiles, je ferai remarquer que leurs progénitures se dirigent doucement vers le langage des australopithèques.
Voilà, fort bien écrit, ce que nous vivons actuellement ! Je crains, hélas, que cela ne s’arrange pas avec le temps !
Ça fait du bien de rire un bon coup avant peut-être de pleurer car ces tarés se multiplient plus vite que les lapins et envahissent tout. J’ai appris ce matin par ma feuille de choux locale que des bobos rennais s’étaient regroupés pour acheter un petit bois où la nature redeviendra primitive (sic) Tout y est interdit, cueillette, pêche, chasse, ramassage du bois mort, débroussaillage du sous bois, etc. Si un arbre vient à tomber, il pourrira sur place pour donner la vie à d’autres organismes. Tout un programme. Je les imagine le soir, rentrant chez eux et se réchauffant autour du poêle à granulés…
Il y avait longtemps que je n’avais pas autant ri, MERCI !
Vousavez oublié le sac a dos les tennis la bicyclette le parfais BOBO
c’est vrai !
Là on peut dire que vous avez fait voyager sur une centaine d’années en cinq minutes:
Nous sommes passés de l’état d’humains un peu sauvages mais sensibles,enracinés dans leur terroir, pleins de saveur et d’authenticité , aux humains trés anglophonés, standardisés ,robotisés, insipides et froids, asexués, presque sortis en serie d’une machine à faire des êtres, comme elle sort des saucisses….de qualité aléatoire.Magnifique description de la métamorphose sociétale.C’est ça le nouveau monde . ……..Les mots pour le dire arrivent aisément ….et les images aussi.Ca c’est du style « émotionnel » car il y a du ressenti.
AH j’ai bien reconnu melancon : j’aurais mis une petite video à cliquer sur sa tête, pour le voir entrain d’aboyer.
Mais qui donc, paraphrasant Boileau, avait sorti cette phrase qui m’amuse toujours autant : « ce qui se conçoit mal s’énonce lourdement, et les mots pour le dire me viennent en allemand »
……….non pas en allemand ,mais en bafouillant avec des fautes à tous les mots: attendez je fais un essai avec la même phrase en WOKISTE: non pazenaleman més en bafouyan
avec des fotes à tou les mos
Véridique ou non, j’adore le « happy end » ! Mon homme et moi avons également emigré en terre Cévenole, depuis bientôt 4 ans, et nous ne le regrettons pas. Le village du père Chabrol .
Nous y respirons sereinement de mi-septembre à mai-juin, hors invasion ! Dommage qu’elle soit infestée d’un peu trop de « rouges » à notre goût, mais ils semblent chez eux… Il y a heureusement quelques exceptions, avec qui nous échangeons parfois sur le triste sort de notre pauvre patrie. Toujours est-il que : vive la France et vivent les Cévennes !
Sévèrement en verve l’Ami Cédric ces temps, pour notre grand plaisir gourmand !
on peut le dire!!