DES TORTS PARTAGÉS ? (Yann Bizien)

Emmanuel Macron est à la peine dans une France qui ressemble à un vaste champ de bataille.

Il a tout faux dans la gestion de crise.

Certes, il voit bien que de multiples causes de radicalisation et de révoltes se rejoignent dans notre société embrasée. Mais la violence physique et morale est partout omniprésente dans notre pays « bordélisé » à la fois par le pouvoir, par la NUPES et par une certaine racaille qui libère partout ses pulsions.

Le président a offert à la foule « insoumise » un mode de légitimation d’une violence « réactive ». La NUPES présente en effet cette violence comme indispensable et ne la dénonce pas franchement. Pour les « insoumis », elle est d’essence exclusivement politique. Elle ne serait qu’une réponse finalement nécessaire à la violence institutionnalisée par le pouvoir.

La NUPES est en réalité en concurrence avec les syndicats à la manœuvre sur le mouvement social. Elle ne cherche donc pas le compromis. Elle se nourrit du conflit et de la désobéissance civile. Elle a besoin de visibilité pour impacter l’opinion, pour construire un collectif activiste, pour faire valoir sa propre empreinte politique dans le pays et pour peser sur l’exécutif. Elle use pour cela de l’énergie de la foule, du carburant de la violence, des mots et des actes, de l’émotion suscitée par les images, de la protestation, de l’indignation, des médias et des réseaux sociaux. Elle amplifie partout le désordre et élève le niveau des tensions pour chercher à faire plier le pouvoir.

La carotte enfin démasquée ! • Le blog du hérisson

Pour tenter de s’en sortir, Emmanuel Macron, retranché dans son Palais, utilise la bonne vieille recette de la carotte et du bâton.

Il tire bien sûr avantage de la politique nationale du maintien de l’ordre. Elle a pour but d’user du monopole légitime de la violence, de la répression et de la brutalité. Elle doit empêcher tout phénomène d’occupation durable de la voie publique, dissuader les citoyens de manifester et circonscrire sans retenue les petits groupes radicalisés qui estiment que le défilé de rue ne suffit plus à se faire entendre.

Pour y parvenir, il dispose d’une panoplie de moyens : contrôles d’identité à grande échelle, usage de la garde à vue afin d’empêcher les citoyens de défiler, gazages rapprochés, intempestifs et massifs, violences physiques à la matraque contre des manifestants désarmés, voire non-assistance à des personnes en danger (débat subjectif en cours), encerclement systématique pour faire cesser des troubles, technique pourtant condamnée par la Cour Européenne des Droits de l’Homme en 2012, contrôles « délocalisés » pour retenir des personnes soupçonnées de se rendre sur une manifestation, entraves à la liberté d’informer, avec de la censure, répression judiciaire et recours aux brigades de répression des actions violentes motocyclistes.

Je note que des preuves de violences policières disproportionnées et illégitimes circulent sur les réseaux sociaux. Je les ai vues.

J’observe aussi que la plupart des gardés à vue bénéficient d’un classement sans suite. Cela démontre que des interpellations sont avant tout destinées à empêcher les citoyens d’exercer leurs droits politiques. Durant la crise des gilets jaunes, une note du procureur de Paris demandait même à la police judiciaire de ne lever les gardes à vue qu’après la fin des manifestations.

C’est donc bien face à la méthode et au style du pouvoir, à sa façon de faire aboutir aux forceps un texte massivement contesté, à son contournement et même à son reniement du Parlement, à sa communication arrogante et inflexible et à son usage excessif et parfois contestable de la force, que la violence de la rue s’est exprimée.

Le dernier recours d’Emmanuel Macron consiste à retourner cette violence physique et verbale observée contre ses principaux détracteurs politiques, majoritairement dans le camp de la NUPES.

Après avoir lui-même semé les graines du chaos dans tout le pays, et avoir mis en mouvement d’immenses foules, Emmanuel Macron se revendique aujourd’hui comme le garant « de l’ordre et de la concorde ». Il condamne les « débordements ». Il s’érige en « ultime rempart face aux violences illégitimes et dangereuses ». Il disqualifie les extrémistes de tous bords qui « veulent saper nos institutions, qui attaquent la République et qui délégitiment les tenants de l’ordre responsable ».

Il oppose surtout la « légitimité institutionnelle à l’illégitimité de la rue » en distinguant la foule du peuple. Pour Emmanuel Macron le peuple est une entité juridique, fictive, constituée par le droit. Il ne doit s’exprimer que dans les formes prévues par celui-ci, c’est-à-dire lors des élections prévues par la Constitution et par le référendum qu’il refuse. Pour lui, donc, la foule de la rue n’est pas le peuple dans l’Etat institué.

Toujours la même bonne vieille tactique, en définitive, celle du maniement du « en même temps », c’est-à-dire de la carotte et du bâton, ainsi que le rejet de toutes les forces politiques en action sur sa gauche et sur sa droite.

Dans cette crise aigüe, chacun cherche à sauver ses positions, à récupérer des soutiens et des dividendes politiques et à disqualifier l’autre.

Emmanuel Macron n’a toujours pas de majorité. Il n’est plus en phase avec le peuple. Il y a un contrat de confiance qui est rompu.

Il a donc tort de ne pas démissionner, de refuser le retrait de ce texte de Loi, de rejeter le référendum, de ne pas dissoudre l’Assemblée nationale et de ne pas remanier car toutes ces options sont démocratiques et chacune lui permettrait une sortie de crise.

Il y a en définitive des torts largement partagés dans la « bordélisation » du pays.

N’oublions surtout pas la retenue et la patience civique exemplaire dont ont fait preuve des centaines de milliers de manifestants. Car, qu’on le veuille ou pas, la démocratie doit vivre. Elle doit permettre l’expression de la conflictualité, de l’opposition et du rapport de forces dans un cadre respectueux des citoyens.

Yann Bizien

31 mars 2023     

8 Commentaires

  1. Pour moi, il faut que ça pète, une bonne fois pour toutes !
    On ne peut pas continuer ainsi !

    • C’est ce que je pense et dis.

      Macron et ses troupes sont tout à fait capables d’embobiner les Français obtus qui ne voteront jamais pour MLP. Le RN, c’est le chaos, entend-on.
      Il est vrai qu’avec Macron, la sérénité règne.
      Donc, oui, il faut que ça pète (et si certains se retrouvent dispersés et ventilés, ce ne serait pas plus mal).

  2. @ jeanmi de corse
    Je vous approuve totalement, cependant, il ne faut pas oublier que le citoyen lambda a octroyé un second mandat à macron en dépit de toutes les vicissitudes de la crise « Covid » que se passerait-il si demain de nouvelles élections seraient proposées à nos concitoyens ??

    • Mais OUI Il pourrait être réélu dans les mêmes conditions avec entre 20 et 25% des voix.
      C’est une équation que je n’ai jamais comprise 0+0 =2 mandats : Ca relève de la magie noire:Ca relève aussi du sd de stockholm: il prend en otage ,il maltraite et rend sa proie soumise.Ils ont tellement peur qu’ils ignorent les autres candidats.Car leur capacité d’analyse est altérée par la peur.
      On sait que c’est un OVNI venu des banques donc les gens ont peur de .perdre leurs moyens d’existence et c’est pour cela qu’ils votent pour lui: En fait c’est une forme d’escroquerie par la peur et le manque de confiance .
      J’ai compris ça depuis ces debuts lorsqu’il s’est présenté contre marine à sa façon de mettre ses mains: un chien comprend ça mieux que nous Un chien comprend si on lui veut du bien à la façon de mettre nos mains.qui étaient refermées sur lui.

  3. Cette situation bénéficie à Macron, car une seule opposition est sur le devant de la scène sa gauche , ce qui lui permet de continuer son petit bonhomme de chemin dans la déconstruction de la France, il restera au pouvoir.
    Et que nos Forces de l’Ordre partent à l’abattoir ne l’émeut absolument pas, ça lui sert même de rempart de la bienséance pensante, il est écœurant.

    • Je suis d’accord avec vous mais quand vous dite :il restera au pouvoir :ça m’effraie.J epense que les français sont maso.

      • En plus d’être maso, les Gaulois dorment ! Ils refusent de voir l’importance de l’immigration comme ils refusent de voir l’amour que notre président porte à tout ce qui est africain ou magrébin ! Et à la vitesse où ces gens-là se reproduisent (comme les souris et les rats) je ne donne pas cher de notre Patrie d’ici les années 2050….. Avez-vous vu le reportage sur les quartiers nord de Marseille par une TV algérienne ? le titre du reportage pour commencer : marseille département français opu wilaya 59 ? cela veut tout dire !

  4. Vraiment c’est bien écrit : Vous dites « violence physique et morale  » oui c’est bien ça car personnellement je ressens pleinement une violence morale et je ne suis pas du tout un NUPES
    Je ne sais que penser de la violence physique car elle est difficilement controlable mais elle
    entraine forcement une prise de conscience populaire et il n’y a que les imbéciles pour ne pas
    la prendre en compte./ faut jeter ce type à la poubelle .Tant pis pour lui s’il ne comprend pas mais surtout pour nous tant qu’il est là.

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