« Il est des lieux où souffle l’Esprit »
(Maurice Barrès, « La colline inspirée » (1)).
« Aux officiers, qu’il soit demandé avant tout d’être des convaincus, des persuasifs, osons dire le mot, des apôtres doués au plus haut point de la faculté d’allumer le feu sacré dans les jeunes âmes ; ces âmes de vingt ans prêtes pour les impressions profondes… »
(Hubert Lyautey, « Le rôle social de l’officier » (2)).
Aujourd’hui, j’ai envie de vous parler d’autre chose que de l’état de dégénérescence morale et mentale, de la déliquescence et du délabrement de notre pauvre pays. Des émeutes récentes ont saccagé nos villes, détruit des commerces, incendié des voitures, blessé nos policiers, etc…mais tout ceci semble déjà oublié. Les Français donnent l’impression de s’habituer à la loi des banlieues de non-droit, de l’accepter lâchement, voire même de la comprendre au nom de la repentance envers une immigration qui aurait, nous dit-on, « une revanche à prendre ».
Après avoir bradé son empire colonial, – et, par là même son autosuffisance énergétique – la France accepte de perdre aussi des quartiers entiers de l’hexagone, livrés aux bandes de trafiquants allogènes ou aux imams intégristes, et elle semble se satisfaire de leur qualification de « territoires perdus de la République » alors qu’ils ne sont pas perdus pour tout le monde.
Non, aujourd’hui, je voudrais vous parler d’une autre France, dont les médias parlent assez rarement – sinon pour en dire du mal – et qui cultive la discrétion à tel point qu’on la surnomme « la grande muette ». Chez nous, depuis le Front Populaire – et même bien avant ! – il est de bon ton d’être antimilitariste sauf quand le pays connaît une période d’attentats islamistes ; mais on oublie vite. On a tendance à oublier que les premiers attentats islamistes datent de 1995. Nous les devions alors à l’Algérie qui exportait son terrorisme. Depuis on n’a retenu que ceux survenus depuis 2015.
Dès qu’un danger survient, nos hommes politiques donnent de la voix. Leurs rodomontades et leurs colères sont beaucoup plus fortes s’ils sont dans l’opposition, sans doute pour faire oublier que, depuis un demi-siècle, ils ont laissé l’Islam salafiste tisser sa toile dans le pays, sans rien faire, sans rien dire, sinon le sempiternel « pas d’amalgame » pour ne pas faire le lit du populisme et/ou du Rassemblement National. Et, comme si la classe politique et les médias à sa botte ne suffisaient pas, quelques matamores et autres stratèges de « Café du Commerce » en appellent à un régime fort, une dictature avec, à sa tête, un général. Le dernier à être plébiscité était le général Pierre de Villiers, coqueluche des plateaux télé à la sortie de son dernier livre « L’équilibre est un courage » (3).
Quand il a quitté son poste de CEMA (4), poussé dehors par l’avorton présidentiel, il a commis un bouquin assez indigeste intitulé « Servir » (5). A l’époque, j’ai écrit que ce livre aurait dû s’appeler « Servir la soupe » tant ce brave général y flagornait les hommes de pouvoir.
L’année suivante, il commettait un nouveau pavé : « Qu’est-ce qu’un chef ? » (6) ; livre qui enfilait les fadaises et les lieux communs propres à toutes les formations en management, les bonnes pages étant inspirées par « Le rôle social de l’officier » de Lyautey. Je n’ai lu que quelques extraits de son dernier opus et je n’ai aucune envie de l’acheter car le titre est une inversion des valeurs. Non, l’équilibre n’est pas un courage, en revanche, seul le courage, la volonté et la force peuvent ramener ce pays à l’équilibre, en espérant que ce soit encore possible !
Cependant, ayant un vieux fond monarchiste (du latin monarchia, lui-même du grec ancien μοναρχία : celui qui gouverne seul) je peux comprendre qu’on appelle de ses vœux un pouvoir fort, une gouvernance autoritaire, et un homme providentiel – un « César » – qui viendrait remettre enfin un peu d’ordre dans la pétaudière ingouvernable qu’est devenu notre pays livré aux exactions d’une faune allogène incontrôlable. D’ailleurs, depuis la Révolution, la France n’est plus « la fille aînée de l’Église » mais une dame de petite vertu. « La Gueuse » tapine comme une fille à soldats.
Elle a besoin de bruits de bottes et elle en redemande, la garce !
Mort de Louis XVI, c’est un général – Bonaparte – qui la sort du « merdier » révolutionnaire. Bonaparte devient Napoléon. Il s’ensuit quinze années de furie. 1815, la France récupère mais la garce réclame à nouveau bottes et cravache. Ce sera le neveu, Napoléon III qui va lui organiser une belle guerre inutile et une défaite cuisante à Sedan.
Puis il lui faudra encore un général ; ce sera Mac-Mahon. La chienne demande encore de la culotte de peau. C’est le général Boulanger, celui qui mourut « comme un sous-lieutenant », qui rate son élection de quelques voix. Pendant la Grande Guerre, elle va aduler Joffre, Foch et Pétain, pour se doter ensuite d’une chambre « bleue-horizon », des civils plus cocardiers que les militaires.
Pendant l’entre-deux guerres, elle se serait bien donnée au colonel de La Rocque si ce dernier avait voulu d’elle. Après la déculottée de juin 1940, elle s’offre, le cul encore nu, à un vieux maréchal de France, Philippe Pétain. Elle va flirter avec le général Giraud avant de s’amouracher tardivement – après le débarquement du 6 juin 1944 – d’un général à titre temporaire, De Gaulle.
L’Indochine s’embrase, elle se rassure en sachant que le conflit sera cogéré par un moine-soldat, l’amiral Thierry d’Argenlieu et le généralissime à la promotion aussi rapide que l’avancée de ses chars, l’ex-capitaine Philippe de Hautecloque, devenu le général Leclerc.
Le 13 mai 1958, elle compte sur « l’homme du 18 juin ». Ce même général De Gaulle qui, selon sa légende, l’a sauvée de l’humiliation de l’armistice en juin 40, puis l’a libérée en 1945.
Si le putsch d’avril 1961 avait réussi, elle se serait jetée dans les bras du général Salan, auquel elle aurait trouvé des qualités républicaines (qualités qu’il avait indéniablement !).
En mai 1968, elle s’est sentie rassurée quand De Gaulle, paniqué devant l’ampleur de la chienlit, s’est réfugié à Baden-Baden auprès de Massu, encore un général !
En avril 2002, devant la présence de Jean-Marie Le Pen au second tour de la présidentielle, j’ai vu le moment où, dans un sursaut républicain, elle allait en appeler à Bigeard. Après tout, il avait encore « bon pied, bon œil », un peu comme le maréchal Pétain en juin 1940 …
Hélas, il ne suffit pas d’un pouvoir fort pour faire (ou refaire) une nation forte mais il faut que le « César » gouverne avec la caution de son peuple.
L’Armée n’est pas faite pour gouverner, elle est là pour nous défendre et pour protéger nos frontières. Il est bon, parfois, de le rappeler !
Mais, me direz-vous, pourquoi nous parler de l’Armée aujourd’hui ?
Parce que, ce samedi 22 juillet, j’étais invité au « Triomphe » de Coëtquidan. L’Académie Militaire de Coëtquidan regroupe trois écoles d’officiers de l’Armée de Terre : En premier lieu, la plus prestigieuse, l’École Spéciale Militaire de Saint-Cyr (ESM). Les « Cyrards », y passent trois années. Puis l’École Militaire Interarmes (EMIA), parcours semi-direct vers l’épaulette ; les élèves passent deux ans à Coëtquidan. Et enfin, le plus récente car elle date de 2001, l’École Militaire des Aspirants de Coëtquidan (EMAC), qui instruit en un an les officiers « contractuels » et réservistes.
Coëtquidan forme l’élite de l’Armée de Terre française. J’en parle d’autant plus aisément que j’étais loin, très loin, d’avoir les qualités intellectuelles permettant d’intégrer Saint Cyr (j’en rêvais quand j’avais… 11 ans, pas après) et que, étant trop indiscipliné et pas assez sportif pour faire un bon officier d’active, je n’ai pas eu le courage de tenter l’EMIA, ceci ne traduit pas, chez moi, un complexe d’infériorité mais un profond respect pour les gens issus de ces deux filières d’excellence.
J’ai été invité au « Triomphe » de la promotion « général Caillaud » par Marie-Françoise, fille aînée du général ; qu’elle en soit remerciée ainsi que toute sa famille présente ce jour-là.
Pourquoi ai-je été invité ? Parce qu’en Avril 1954, dans un coin du Haut-Tonkin appelé Diên-Biên-Phu, alors que se jouait, dans l’indifférence générale, la défaite d’une garnison héroïque, deux capitaines paras se sont liés d’une amitié indéfectible : l’un s’appelait « Bob » Caillaud, l’autre « Jeff » de Verdelhan, mon père. Ils étaient ensemble le 7 mai 1954, quand la garnison a déposé les armes, faute de munitions, sans drapeau blanc ; ils ont connu la longue marche vers les camps, puis la « clémence de l’oncle Hô » (Hô-Chi-Minh) au camp N°1. Après quatre mois de captivité, mon père pesait…39 kg, « Bob » Caillaud ne devait pas peser beaucoup plus lourd.
Ensuite, mon père a quitté l’Armée, avec le grade de Lt-colonel, après la perte de l’Algérie française. « Bob » Caillaud a continué sa brillante carrière sous béret vert ou rouge. Il a révolutionné le 2ème REP (7), commandé l’École des Troupes Aéroportées à Pau, créé le brevet des « Chuteurs opérationnels » (8), etc… Général de division en retraite, il a présidé « l’entraide parachutiste ».
Il est mort relativement jeune, à 73 ans, comme mon père, après une vie exemplaire.
J’étais venu, jadis, au « Triomphe » de Saint-Cyr en 1968 ou 69, invité par je ne sais qui ?
Je suis repassé à Coëtquidan, en juillet 1972, pour une simple étape, en revenant d’un stage au Centre d’Entrainement Commando de Quelern, dans le Finistère, il y a …un demi-siècle.
Samedi, mon état d’esprit était très différent, je venais rendre hommage à un grand soldat. Je venais partager un « devoir de mémoire » avec Marie-Françoise Caillaud et son frère Michel, lui-même Saint-Cyrien et officier légionnaire parachutiste. Ce fut un moment d’émotion, de ces instants trop rares qui vous redonnent une bouffée d’espoir dans l’avenir de notre nation, qui vous instillent un peu de baume au cœur, qui vous font côtoyer une autre France, jeune, belle, intelligente, cultivée, solide dans ses valeurs et fière de servir son pays.
Tradition oblige, Le « Triomphe » commence par une messe solennelle célébrée par l’évêque aux Armées, assisté par plusieurs aumôniers militaires dont le « padre » Yannick Lallemand grande figure des paras et légionnaires. Je suis très sensible à cette symbiose du sabre et du goupillon que la Révolution et l’influence des Loges maçonniques depuis, n’ont pas encore réussi à tuer.
Les jeunes de la promotion « Général Caillaud » ont le culte de leur parrain. En parlant avec eux je me remémorais ce chant para appris quand j’avais 20 ans :
« Tes anciens ont souffert sur la piste/ Comme des chevaliers et des preux/ Dans ton cœur, soit le parachutiste/Toujours prêt à faire aussi bien qu’eux… ».
Ces jeunes « Cyrards » appartiennent indéniablement à une élite. « Mens sana in corpore sano », ils veulent servir comme leurs anciens.
Dans un monde ou l’hédonisme narcissique est devenu la règle et où beaucoup ne songent qu’à se servir, ça force le respect, d’autant plus qu’ils sont éminemment sympathiques et ne se prennent pas au sérieux. Je remercie la famille Caillaud mais aussi à la « promo Caillaud »
Ces jeunes officiers, j’en ai l’intime conviction, connaitront la guerre. Sera-ce le conflit « de haute intensité » contre l’ogre russe dont semblent rêver le vieux Joe Biden, Ursula von der Leyen, et quelques illuminés au sein même de nos Forces Armées ? Si j’en crois un ami général, nous subirions alors, en quelques jours, une raclée encore plus mémorable que celle de juin 1940. Non pas à cause de nos soldats – qui sont fort bien formés – mais en raison du manque d’effectif et de l’obsolescence d’une grande partie de notre matériel, sans parler de la faiblesse de nos stocks de munitions. Songez qu’il aura fallu mobiliser…140 000 gendarmes et policiers pour « sécuriser » les festivités du 14 juillet.
A l’heure actuelle, notre Armée de Terre, réduite à une peau de chagrin, compte 130 000 militaires, dont environ 15 000 réservistes. Qui se souvient encore que pour gagner militairement la guerre d’Algérie, le général Maurice Challe a maintenu une Armée de 500 000 hommes sur les seuls départements de l’Algérie française ? Je précise que mon ami général n’a pas appris à faire la guerre autour d’un bac à sable, mais en « dropant le djebel » algérien, comme lieutenant puis capitaine, avec sa section puis sa compagnie de légionnaires-paras.
Je ne souhaite pas aux jeunes officiers de la « promo Caillaud » (ni à d’autres bien sûr !) de servir de chair à canon dans un conflit qui ne devrait pas nous concerner sachant que l’Ukraine – pays mafieux – ne fait partie ni de l’Union Européenne, ni de l’OTAN. Mais je pressens qu’un jour – quand, je l’ignore ? – il leur faudra défendre leur pays et mener une guerre de civilisation au sein même de l’hexagone contre un ennemi de l’intérieur que la bienpensance ne veut pas nommer.
Ils se souviendront alors, du moins je l’espère, que la belle devise du « Roi Jean » de Lattre de Tassigny était « Ne pas subir », et que la liberté se mérite et se gagne. Je l’espère, pour la survie de notre civilisation, de notre pays, et des valeurs de l’Occident chrétien (car je ne sais toujours pas ce qu’on entend par « valeurs républicaines »).
C’est aussi pour ça que ma sympathie va à « La Caillaud » et non à la racaille.
Éric de Verdelhan
24 juillet 2023
1)- « La Colline inspirée » roman de Maurice Barrès publié en 1913 chez Émile-Paul Frères.
2)- « Le rôle social de l’officier » d’Hubert Lyautey, publié en 1891 quand il n’était que capitaine.
3)- « L’équilibre est un courage » Fayard ; 2020.
4)- Chef d’Etat-Major des Armées.
5)- « Servir » Fayard ; 2017.
6)- « Qu’est-ce qu’un chef ? » Fayard ; 2018.
7)- 2ème REP : Régiment Etranger Parachutiste, seule unité parachutiste de la Légion Etrangère depuis la dissolution du 1er REP en avril 1961.
8)- Il a passé son brevet de « Chuteur-Ops » avec succès à 52 ans.
Respect Mr de Verdeilhan ! et mercipour ce texte ! Il est plus que temps que les Gaulois redressent la tête car le « quoi qu’il en coûte » d’un gamin qui se vante de nj’avoir pas fait son service militaire est un désastre pour notre Patrie.AUX ARMES CITOYENS !
Un grand MERCI pour votre texte, si clairvoyant.
Cette rétrospective complète des moments forts subis par la France depuis 1789 est forcément très instructive concernant le lien qui existe entre la grande muette et le civil ..surtout lorsque ce dernier a besoin de l’Armée . Il n’y a qu’à entendre voir la propagande de radio Paris qui porte aux nues depuis un an cette armée qu’elle vilipendera à nouveau lorsque qu’elle n’en aura plus besoin . Donc merci pour ce rappel historique . Par contre concernant cette Armée Française , il existe un paramètre fondamental qui n’existait pas jusqu’à la fin du XXe siècle , celui des militaires français qui ont déclaré l’islam comme religion , on entends 15 a 17% de musulmans dans les effectifs d’unités et d’ailleurs les rations halal sont là pour nous le rappeler . Lorsqu’a un moment donné il faudra que ces unités militaires fassent le ménage dans l’hexagone ( je dis bien quand et non pas si…) je ne suis pas certain de l’engagement de tous pour sauver la France , d’autant plus que le CEMA a l’époque disait que pour reconquérir les zones perdues par la République dans l’hexagone il lui faudrait des milliers d’hommes , et qu’il ne les avait pas , tout simplement..et il y a une dizaine d’années déjà , imaginons en 2023/24
SERVIR ET NE PAS SUBIR
Merci, Monsieur, pour ce magnifique billet.
Salut et respect à cette France qui nous manque chaque jour.
L’armée défend notre territoire intérieur / extérieur, point. Les valeurs républicaines ? ce sont nos institutions.
À vous lire, je constate que beaucoup d’hommes d’Etat ont été des militaires et je constate aussi que depuis que des hommes de la société dite civile sont au pouvoir, nous avons glissé lentement mais sûrement dans l’horreur.
Alors, un militaire au pouvoir ? Vous parlez de moralité, du sens, ce n’est pas l’apanage des militaires et vous devez le savoir.
Quid de la France? Juste un homme bienveillant, fort puisque vous la féminiser.
Vous faites un bon constat et effectivement depuis que des hommes sont issus de la société civile,on glisse sur le toboggan de l’anarchie:C’est l’horreur de l’homme sans foi ni loi dans toute sa splendeur avec inversion des valeurs.Il faudrait Juste un homme bienveillant C’est ce qu’on souhaite.
OUI l’armée n’est pas faite pour être au pouvoir/ oui quand l’ennemi est au pouvoir ,elle peut néammoins servir à virer avant l’heure un president imposteur surtout que Cet individu nous annonce que la france
doit recupérer son independance.Ah bon je ne savais pas qu’on l’avait perdue .Néammoins s’il veut recupérer l’independance de la france qu’il passe d’abord par la separation d’avec l’UE.Mais en fait ne vous méprenez pas ,ce jeu est un bluff pour pouvoir remplacer URSULA car si la france s’en allait ,
fini la poule aux d’or et donc par consequent macron aura de fortes chances d’être president de l’union européenne.pour nous les cons restions des cons.
On n’a pas fini d’en baver.Ce type est une plaie.
Moi aussi, j’attendrais volontiers que l’Armée chasse le Morveux.
Mais, à ma stupéfaction, j’ai lu hier sur Place d’Armes un billet de Fabre-Bernadac accusant les Français d’être des lâches. De mon point de vue, beaucoup de nos compatriotes sont, il est vrai, indifférents à la situation de la France et c’est regrettable. Mais lorsque la France est en danger, en voie de submersion par une population totalement incompatible avec la nôtre, l »Armée ne devrait-elle pas s’interroger sur le dilemme suivant : rester sous le joug du Morveux ou entreprendre de libérer et sauver la France ?
Excellent.
Bravo mon Général.
Il est grand temps de se réveiller