Selon Machiavel, « pour échapper à une guerre perpétuelle ruineuse, ils [les pays] devront tenter de maintenir un équilibre des forces ». C’est le but de la plupart des traités de paix. C’est visiblement aussi celui de la coalition menée par les États-Unis en Syrie où un an et quatre mille bombardements aériens n’ont visiblement servi qu’à stabiliser les positions de l’État Islamique (ad-dawla al-islāmiyya, acronyme arabe Daesh) et éviter « une guerre perpétuelle ruineuse », comme en Afghanistan où les troupes américaines sont contraintes de prolonger leur séjour pour une durée indéterminée.
Les Russes ont fait mieux en une semaine, et les coalisés sous le pavillon américain se demandent comment et pourquoi. Répondre à pourquoi est simple, comme pour la France en Libye « pour des raisons militaires et économiques… une opportunité pour (la Russie) de se réaffirmer en tant que puissance militaire ». C’est aussi parce que les Russes ont compris qu’il n’y aura pas de paix et de retour à un État multiethnique et multiconfessionnel sans Bachar el-Assad et que si Bagdad et la région de Lataquié, berceau des Alaouites, tombent aux mains des terroristes, qu’ils soient ceux de l’État Islamique ou ceux d’al-Qaïda-al-Nosra et ses satellites dits modérés, ils perdront leur grande et seule base militaire en Méditerranée. Ils ne soutiennent pas Bachar el-Assad par amitié ni sympathie, mais uniquement par intérêt.
Leur seconde raison d’intervenir est qu’ils ont compris quel l’objectif réel des États-Unis et de leurs sous-fifres, la France et les États arabes du Golfe : ils veulent le départ de Bachar el-Assad, et dans son cas, partir c’est mourir un peu. Mais ce n’est pas non plus pour faire plaisir aux quelques Sunnites, soi-disant modérés, alliés à al-Qaïda que Bachar el-Assad avait entrepris d’exterminer quand ils ont voulu le renverser. États-Unis et coalition, agissent aussi par intérêt : prendre le contrôle des champs de pétrole et de gaz syriens, et par la même occasion chasser les Russes de la Méditerranée. Pourquoi les Russes ont-ils attendu quatre ans pour intervenir ?
Parce qu’il leur a fallu ce temps-là pour se préparer à prendre la place de la coalition en Syrie.
Prêts ? Ils le sont aujourd’hui.
Comment ?
Ce comment inquiète énormément les Occidentaux d’où ce déferlement d’hostilité qui frise la haine contre la Russie, complaisamment relancé par les médias, qui se contentent de relayer les dépêches de l’agence socialiste AFP, dont la direction et la rédaction se contentent elles mêmes de répéter les instructions élyséennes, le tout sans la moindre analyse et réflexion.
Car en acheminant jusqu’en Syrie 28 avions et hélicoptères russes venant de Russie après avoir survolé la mer Caspienne et l’Irak – zones sous étroite surveillance radar et optique – sans être repérés, les Russes ont fait la démonstration que leurs systèmes d’invisibilité aux radars sont au point !
« C’est avec surprise que la presse internationale a constaté la « téléportation » de 28 avions et hélicoptères de combat russes à l’aéroport international de Lattaquié… La découverte ne s’est faite qu’après l’étude d’images obtenues par satellite. » (Courrier International)
Soit 12 chasseurs-bombardiers Sukoï 24, 25 et 34 et 16 hélicoptères d’attaque Mil-24. Personne n’a détecté au radar le vol de cette armada aérienne jusqu’à l’atterrissage en Syrie, malgré les AWACS d’alerte précoce américains à la frontière de l’Irak, qui ont un rayon de détection de 500 km, les radars militaires au sol, les avions-patrouilleurs Gulfstream G550 d’observation israéliens le long de la côte de la libanaise et syrienne.
La flotte militaire aérienne russe a pu parcourir 2.400 km en survolant à moyenne altitude et vitesse subsonique (autrement dit sans presque se cacher ni se presser) des pays ennemis sans être repérée, montrant ainsi que les Russes ont pris une bonne avance sur les occidentaux en matière de combat aérien. En effet, les hélicoptères ont volé à moins de 4.000 m et entre 240 et 300 km/h, les Sukoï un peu plus haut, moins de 8.000 m et plus vite (entre 600 et 700 km/h) sans que personne ne les voie, qu’aucun radar ne les repère !
Une vraie claque pour le Pentagone, Obama et Le Drian.
Il ne s’agit évidemment pas de “téléportation” comme le dit Courrier International, mais de l’application de techniques évoluées de manipulation des radars ennemis. Comme celles qui ont permis au vol MH-370 reliant Kuala Lumpur à Pékin de virer au-dessus de la Mer de Chine (ultra-surveillée) de survoler la Malaisie, la Thaïlande et tous leurs radars civils et militaires, pour aller se perdre en Océan Indien sans que personne ne sache par où il est passé, ni où il a disparu.
D’abord, le trajet de la flotte aérienne russe a été repéré jusqu’à Lattaquié, depuis les bases aériennes 387 et 368 de Boudionnovsk dans le Caucase, jusqu’à la base aérienne russe en Syrie, par un Iliouchine-20-M1 (quadriréacteur d’observation) passé lui aussi inaperçu.
Il a pris autant de photos qu’il a voulu. L’avion possède un système E-LINT (Electronic Intelligence) et dispose de divers équipements pour l’interception et le brouillage des communications militaires : radar et téléphonie mobile, appareils-photo haute résolution (A-87P), un radar Kvalat-2 embarqué qui permet d’afficher sous forme numérique une carte du terrain jusqu’à une distance de 300 km (détectant automatiquement les véhicules en mouvement, les blindés, les pièces d’artillerie ou le déploiement de ceux déjà connus dans un autre emplacement).
Pour voir certains points sensibles de plus près, des drones de reconnaissance Pchela-1T sont allés repérer et filmer d’éventuels sites “EI” équipés de batteries antiaériennes : pas vus non plus, les drones !
Pour parcourir 2.400 km, avions et hélicoptères russes sont équipés de réservoirs supplémentaires. Sinon, il faudrait les faire accompagner d’un Antonov 124 ravitailleur. Sur les Sukoï sont ajoutés des containers ECM de type SAP-518/ SPS-171, et aux hélicoptères des équipements de contre-mesures électroniques de type Richag-AV, le tout ayant un rayon d’action de 400 km. Les Russes ont clairement imposé leur suprématie en matière de guerre électronique (EW − Electronic Warfare), mais la façon dont ils y sont arrivés reste entourée de mystère. Le redoutable système russe de collecte et de traitement de l’information reste également enveloppé de mystère.
Ils peuvent identifier les cibles des bombardements et leur répartition parmi les différents types d’avions, tout en empêchant les Américains et leurs alliés de découvrir quoi que ce soit de leur modus operandi. Or, en l’absence d’un minimum d’informations, les Américains ne peut pas déclencher de contre-mesures électroniques (ECM) efficaces contre les Russes en Syrie ! Pour protéger leur dispositif contre les moyens de recherche, les Russes ont déployé en Syrie, plusieurs Krasukha-4.
Le Krasukha-4 est un équipement à bande large mobile, monté sur le châssis 8×8 de type BAZ-6910-022, qui brouille les radars de surveillance des satellites militaires, les radars au sol et aériens de type AWACS et ceux montés sur des avions sans pilote (drones). Le Krasukha-4 est le seul système capable de brouiller les satellites-espions américains.
À cela s’ajoute le navire Priazovye (de classe Vishnya) appartenant à la Flotte russe de la Mer Noire, qui a été déployé en Mer Méditerranée, près de la côte syrienne. Ce navire est spécialisé dans le brouillage et la collecte des informations de type SIGINT et COMINT (interception de tous les réseaux de communications).
De plus, les alentours de l’aéroport de Lattaquié sont surveillés en permanence par 4 à 6 mini-avions et hélicoptères sans pilote de type de ZALA, ultralégers et silencieux, propulsés par un moteur électrique, avec un rayon d’action allant jusqu’à 30 kilomètres.
Pour détecter les cibles pour les missions de bombardement de moyenne distance, les Russes utilisent 36 avions sans pilote type Yakovlev Pchela-1T et Orlan-10, et pour la surveillance de la totalité du territoire syrien, des drones de reconnaissance Dozor-600 ou Altius, similaires aux MQ-1B Predator américains.
Pour la surveillance de l’ensemble du territoire syrien, les Russes ont également déployé des avions de reconnaissance E-LINT, de type Iliouchine-20M1, équipés de radar Kvalat-2, qui peuvent détecter des avions, des véhicules terrestres et des pièces d’artillerie jusqu’à une distance de 300 km. Ils sont, de plus, équipés de systèmes d’interception et de brouillage de toutes les communications militaires, radars et téléphonie mobiles.
On comprend mieux pourquoi les Américains et l’OTAN sont tellement furieux de la présence russe en Syrie : les Russes les rendent aveugles quand ils le veulent et ils pourraient casser le beau plan de bordel productif mis en place depuis quatre ans par les Occidentaux pour détruire Bachar el-Assad !
L’Imprécateur