Le projet d’admission à l’UNESCO de la province de « Kossovo et Métochie », que l’ONU appelle simplement Kosovo, est un non-événement.
Peu importe quel membre du conseil exécutif a suggéré d’inscrire cette question à l’ordre du jour de l’assemblée générale qui s’ouvrira le 3 novembre, ce n’est de toute évidence pas la Serbie puisqu’elle n’est pas membre du conseil en 2015.
L’acte constitutif de l’UNESCO prévoit la catégorie de membre et celle de membre associé. Étrangement, le conseil exécutif recommande expressément d’accueillir ce territoire « en tant que membre », statut qui est réservé aux États, qu’ils soient membres de l’ONU ou pas. Bien qu’il appelle son protégé « République du Kossovo », le conseil n’omet pas de rappeler que cette admission se ferait « dans le cadre de la Résolution 1244 du Conseil de Sécurité des Nations-Unies ». Or la résolution 1244, prise le 10 juin 1999, rappelle l’appartenance du « Kosovo » (en réalité la province de Kossovo et Métochie) à la République fédérale de Yougoslavie et insiste à plusieurs reprises sur l’importance de la souveraineté et de l’intégrité territoriale de ce pays (la Yougoslavie). Le seul point où cette résolution mentionne une autre république que la RFY fait manifestement référence à la Serbie (« forces… fédérales et de la République »). L’UNESCO a reconnu la Serbie comme État membre successeur de la RFY (rebaptisée en 2003 Serbie et Monténégro) après la sécession de ce dernier, en 2006.
Ainsi le Kossovo ne pourrait pas être admis comme État membre de l’UNESCO puisqu’il n’est pas un État reconnu par l’ONU, alors que celle-ci peut reconnaître la souveraineté d’États non membres comme le Vatican, la Palestine et jusqu’en 2002 la Suisse. Tant d’après l’acte constitutif de l’UNESCO que d’après la résolution 1244 du Conseil de Sécurité de l’ONU invoquée par le conseil exécutif, le Kossovo ne pourrait être admis que comme membre associé, statut accordé à des territoires présentant une spécificité culturelle par rapport au reste de leur pays d’appartenance, comme par exemple Macau, les îles néerlandaises de Curaçao, Aruba et Saint-Martin ou les îles britanniques Vierges, Caïmans et Anguilla. L’admission d’un tel territoire comme membre associé est possible, selon le 3ème alinéa de l’article II de l’acte constitutif de l’UNESCO, à une majorité des deux tiers des membres, sur demande de l’État membre (ou de l’autorité) responsable des relations extérieures dudit territoire. Selon la résolution 1244 à laquelle s’est référé le conseil exécutif de l’UNESCO en recommandant l’admission du Kossovo, la souveraineté de ce territoire jouissant d’une autonomie substantielle appartient sans équivoque à la Serbie. C’est donc à celle-ci qu’il revient de demander, si elle l’estime judicieux, l’admission du Kossovo comme membre associé à l’UNESCO.
De toute évidence l’acteur (État membre, groupe de pression occulte ?) qui a introduit cette idée irrecevable cherchait à lancer une polémique entre États membres ou à donner de faux espoirs à d’autres mouvements séparatistes sanguinaires cherchant l’émancipation de leur État d’appartenance, et évidemment les premiers commentateurs ont tourné le regard vers les mercenaires islamistes étrangers qui entendent soustraire une bonne partie de la Syrie et de l’Iraq, en essayant de rivaliser avec leurs homologues qui occupent le sud de la Serbie, sur le terrain de la destruction systématique du patrimoine religieux et historique, rivalité d’ailleurs sans espoir puisqu’en dépit de la richesse archéologique de la Syrie le nombre de sites connus, inscrits au patrimoine de l’humanité ou pas, est bien inférieur.
Mais, tant au regard du droit international qu’à la lecture des textes de l’ONU et de son agence l’UNESCO, et à moins de convaincre la Serbie de présenter une demande pour sa province comme membre associé non étatique, l’initiative semble vouée à l’échec.
STRATEDIPLO (www.stratediplo.blogspot.com)