ARABIE-IRAN : LA GUERRE DES RELIGIONS (par l’Imprécateur)

Le conflit actuel entre l’Arabie et l’Iran, vu d’Europe, semble n’être que l’épiphénomène d’un conflit beaucoup plus vaste et plus ancien que les Occidentaux en général et les États-Unis en particulier, croient maîtriser en y intervenant de manière le plus souvent stupide et anarchique, obsédés par la seule chose qui compte réellement à leurs yeux : garantir la sécurité de leurs approvisionnements en hydrocarbures.

C’est une réalité, la terre arabe suinte littéralement de pétrole, “un don de dieu”, disent les Arabes. Ce pétrole a été découvert par les Occidentaux et longtemps exploité par eux, aujourd’hui les Arabes le contrôlent par une organisation professionnelle où ils sont majoritaires : l’OPEP. Cette suprématie est remise en cause par l’exploitation des schistes bitumineux nord-américains et l’émergence des énergies dites “renouvelables”. Ces deux productions malgré des progrès récents restent très coûteuses et, pour les énergies renouvelables, elles sont aléatoires. Les Arabes résistent en baissant le prix du pétrole.

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À cette caractéristique s’en ajoute une seconde : la terre arabe est très majoritairement musulmane. Seulement, là où les Occidentaux voient une seule religion, l’Islam, et une seule communauté, “l’oumma”, il y a en réalité des dizaines de sectes dont deux dominent en effectifs de croyants : le Sunnisme et le Chiisme. Chacune des sectes est convaincue d’être la seule à détenir “l’Islam vrai” qui lui donnera l’accès au paradis d’Allah. Certaines sont pacifiques et vivent en harmonie avec les autres religions, comme les Soufis mevlevis. Beaucoup sont peu agressives et ne le sont en fait que pour se défendre si nécessaire : Malékites, Hanbalites, Alaouites… Les deux majoritaires, mais dans un rapport de un à cinq en faveur du Sunnisme, croient à leur mission divine de convertir de gré ou de force le monde à l’Islam.

Après un premier échec militaire face à l’Europe, mais aussi l’Inde et la Chine, qui s’est traduit par la colonisation humiliante de la terre d’islam, “dar el-islam”, au XIXème siècle, Chiites et Sunnites voient dans l’affaiblissement militaire de l’Europe et celui intellectuel de son élite ramollie par le droit-de-l’hommisme, une possibilité de reconquête par l’islamisation rapide, deux ou trois dizaines d’années, de la plus grande partie de l’Europe. Pour cela l’Islam se sert pour son seul profit des “valeurs” qu’une certaine gauche décérébrée croit “universelles”.

« Vous êtes riches, nos peuples sont pauvres, vous devez les accueillir et les nourrir » disent les dirigeants musulmans. Aucun dirigeant européen n’est là pour leur répondre que, s’ils commençaient par mettre au service de leurs peuple les immenses richesses dont les énormes profits leur permettent d’acheter nos entreprises, nos palaces, nos plus belles voitures, nos clubs de foot et même un bon nombre de nos politiciens, les peuples musulmans ne serait pas obligés de fuir les terres musulmanes pour coloniser l’Europe.

« Vous n’avez plus foi en votre Christianisme, la laïcité est une hérésie, nous vous apportons la seule vraie foi, l’Islam. Convertissez-vous par la volonté et la permission d’Allah ». Pas un dirigeant européen pour leur répondre que nous avons aussi un principe qui découle de la notion républicaine d’égalité, la réciprocité, et que nous accepterons les mosquées s’ils acceptent chez eux des églises, des synagogues et des temples.

Heureusement, si l’on peut dire, la conquête sunnite de l’Europe par la richesse des dirigeants musulmans, les mosquées “dont les minarets sont les baïonnettes” et la terreur que provoque le terrorisme islamique, est ralentie parce qu’une grande partie de l’énergie colonisatrice de l’Islam est absorbée par les guerres internes à l’Islam. Cette religion ayant été fondée par son prophète Mahomet sur trois piliers indissociables : la foi en Allah, la gouvernance absolue de la société par la charia et la violence des armes musulmanes, le fameux “sabre de l’islam” qui orne beaucoup de drapeaux de pays musulmans, dont celui de l’Arabie saoudite.

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Ce pays est le fer de lance de la colonisation musulmane de l’Europe. Avec son immense richesse, il peut financer l’armement des mouvements terroristes qu’il manipule et dissimule sous des noms et des méthodes d’action diverses : al-Qaïda, al-Nosra, Daech, AQMI, GIA, Boko Haram, etc. qui idéologiquement sont structurés par le mouvement international des Frères Musulmans, éventuellement peuvent se battre entre eux pour des questions de domination territoriales, mais concourent tous à la main mise de l’Arabie sur “dar el-Islam” et à la préservation de sa source de richesse principale : les gisements pétroliers.

C’est pourquoi la montée en puissance du Chiisme concurrent, dont le grand pays est l’Iran, suscite la fureur arabe. Le 2 janvier, l’Arabie saoudite a donné le ton en exécutant 47 personnes accusées d’actes de terrorisme, dont le cheikh Nimr Baqer al-Nimr, dignitaire chiite et figure de la révolte contre les Saoud, le plus grand nombre étant des membres d’AQPA (al-Qaïda dans la péninsule arabique). Objectif : reprendre en main les mouvements radicaux sunnites qui séduisent une partie non négligeable des Saoudiens, et donner un avertissement à l’Iran chiite qui soutient des mouvements révolutionnaires anti-saoudiens, comme au Yémen. L’Arabie veut montrer qu’elle reste le défenseur des Sunnites et qu’elle ne tolère aucune contestation de son pouvoir chez elle. En même temps, elle se donne vis-à-vis des Occidentaux de faux-airs de champions de la lutte contre le terrorisme qu’elle finance, c’est la “taqqyia”, la dissimulation.

L’exécution du cheikh Nimr Baqer el-Nimr s’inscrit dans la continuité de la politique anti-iranienne menée par l’Arabie. La menace iranienne est clairement perçue comme prioritaire par rapport à la menace des jihadistes sunnites. « Il y a comme une paranoïa au sein de l’establishment saoudien quant à la menace iranienne. Comme si la flotte iranienne était toute proche de leurs côtes et que l’armée iranienne s’apprêtait à les envahir. Les Saoudiens se sentent abandonnés par les Américains, ce qui n’est pas tout à fait faux. Le paradoxe, c’est que les Iraniens, de leur côté, sont moins tendus et moins agressifs depuis la signature de l’accord nucléaire avec les 5+1. Les Saoudiens sont complètement irrationnels quand il s’agit de l’Iran. Mais la peur a tendance à accélérer l’avènement de ce dont on a peur », analyse un diplomate arabe cité par L’Orient le Jour.

En Iran, la réaction à l’exécution du dignitaire chiite ne s’est pas faite attendre. L’ayatollah Ali Khamenei a affirmé que les dirigeants saoudiens devraient s’attendre à une vengeance “divine”. Des manifestations ont ensuite éclaté en Iran, où l’ambassade d’Arabie saoudite a été attaquée, en Arabie, au Yémen, au Liban, à Bahreïn, en Irak, au Pakistan, au Cachemire indien, donnant une réelle dimension politique, au moins pour un temps, à la notion de “croissant chiite” : ensemble des pays à majorité chiite. « Les Iraniens ont pleinement intériorisé le fait qu’ils sont les protecteurs des minorités chiites dans le monde arabe. »

La tension est encore montée d’un cran quand Riyad a annoncé la rupture de ses relations diplomatiques avec Téhéran. Mais, « Il n’y aura sans doute pas de réactions militaires de la part de Téhéran, mais des risques d’exacerbation des crises au Liban, à Bahreïn et en Irak. Il risque d’y avoir un raidissement de la part du Hezbollah ».

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Déjà en pleine guerre par procuration en Syrie et au Yémen, Riyad et Téhéran pourraient être tentés de poursuivre leur affrontement sur d’autres théâtres afin de conquérir l’hégémonie régionale qui se traduit par le monopole de la légitimité politique et religieuse, ainsi que la domination sur le marché du pétrole. La crise entre les deux théocraties du Golfe risque également de compromettre toute chance de résolution des conflits en Syrie et au Yémen. « En Syrie, le processus est en panne. Au Yémen, on cherche à sauver la face de chacune des parties. On est loin de compromis politiques. »

La division Sunnites/Chiites n’est certes pas le seul facteur d’instabilité dans la région. Mais la politique menée actuellement par Riyad et par Téhéran contribue à en faire la principale source de tensions dans tout le Moyen-Orient. [Source : L’Orient le Jour]

Les États-Unis profitent de ces conflits permanents dans le monde islamique pour faire avancer leurs affaires, parfois à notre détriment. L’Europe n’a plus de diplomates vraiment compétents comme ils l’étaient autrefois quand France et Grande-Bretagne se trouvaient au Levant comme des poissons dans l’eau. Laurent Fabius a accumulé en trois ans un nombre impressionnant d’erreurs d’analyse, que ce soit sur l’Égypte, la Syrie, le Yémen, Israël, l’État Islamique, la Russie ou l’Ukraine, se plaçant le plus souvent à la remorque des États-Unis, manipulé aussi bien par John Kerry que Sergeï Lavrov et le roi Salmane d’Arabie. Il serait urgent de le débarquer du Quai d’Orsay avant que la France ait perdu toute crédibilité internationale. Il est malheureusement à craindre que le président Hollande, qui a toujours fait passer sa petite cuisine corrézienne avant l’intérêt de la nation, le garde au gouvernement jusqu’en 2017 par peur de perdre les voix du courant fabiusien au sein du PS.

L’Imprécateur

Bannière 2016


quincy 4L’alliance des USA avec l’Arabie Saoudite a été matérialisée par le Pacte du Quincy signé à bord du croiseur-lourd US de ce nom mouillant au large d’Alexandrie le 14 février 1945 par Franklin Roosevelt peu de temps avant sa mort, qui revenait de la Conférence de Yalta, et le roi d’Arabie, Abdelaziz ibn-Seoud, fondateur de la dynastie. L’objet de ce pacte (renouvelé 60 ans après par George Bush Jr. et Fahad) était d’assurer la fourniture en hydrocarbures des armées US pour prendre l’URSS par le sud en prévision de la Guerre Froide.

Depuis, les lobbies militaro-industriel et pétrolier US (indéfectiblement soudés) en ont fait leur bible. Cette alliance Washington/Riyad, apparemment contre-nature, est devenue le pivot central de la géopolitique américaine au Moyen-Orient. Les concessions des USA aux théocraties wahhabites ont perduré jusqu’à nos jours avec toutes les conséquences déstabilisatrices induites, parce que Washington voit en l’invasion islamiste le moyen le plus sûr d’annuler la puissance économique et politique de l’Europe par un plan secret qu’ils ont non seulement approuvé, mais encore concocté avec l’obscurantisme le plus pervers des temps modernes.

Les dés sont jetés. Ceux qui voient dans les États-Unis le sauveur de l’Occident s’allient avec le Diable. Souvent par ignorance du dessous des cartes de la géopolitique internationale, mais aussi par lâcheté et par cécité.

Il n’est pire aveugle que celui qui ferme les yeux pour perpétuer l’illusion de ses fantasmes les plus égoïstes et irréalistes.

LS