LA COHABITATION ENFREINT LA SOUVERAINETÉ POPULAIRE (Jean Goychman)

 

 En 1962, le référendum modifiant la Constitution rassemble une grande majorité des électeurs. Nombres d’opposants, partisans d’un régime plus « parlementaire », s’étaient indignés, certains allant même jusqu’à dénoncer un véritable « coup d’État »

Peu s’en souviennent (c’était il y a soixante-deux ans) mais la crise politique que traversait le pays était en de nombreux points comparable à celle que nous connaissons aujourd’hui. Le Congrès avait refusé cette proposition et de Gaulle avait provoqué un référendum sur le sujet.

Voici le cours des évènements relatés par Wikipédia :

« Ce choix déclenche des protestations très vives de la part de la plupart des parlementaires et une motion de censure est déposée contre le premier gouvernement Georges Pompidou par l’ensemble des partis politiques de l’Assemblée nationale (à l’exception du mouvement gaulliste) et adoptée le 5 octobre 1962. Le président de la République prend la décision de dissoudre l’Assemblée nationale et d’organiser des élections législatives après le référendum.

Le 1er octobre 1962, l’assemblée générale du Conseil d’État émet un avis défavorable au recours à l’article 11 de la constitution, considérant le projet contraire à la Constitution, et ce, à une quasi-unanimité. Le 2 octobre, sept des dix membres du Conseil constitutionnel font part de leur « hostilité absolue » dans un vote officieux 4. Dans son discours au Sénat 5, le président Gaston Monnerville conteste la légalité de la mesure, et renforce la crise en demandant la démission voire l’arrestation du président, dont il dénonce la « forfaiture » 6.

Gaston Monnerville place le Conseil constitutionnel devant un choix très fort, une fois que le vote a eu lieu : refuser le référendum, ce qui pourrait entraîner la démission de De Gaulle ou des émeutes, ou valider le procédé. La crise politique est donc d’une rare violence. Le Conseil constitutionnel s’estime finalement incompétent pour juger de la conformité constitutionnelle d’une loi adoptée directement par le peuple français, légitimant ainsi la procédure employée7. »

La phrase essentielle est là :

« Le Conseil constitutionnel s’estime finalement incompétent pour juger de la conformité constitutionnelle d’une loi adoptée directement par le peuple français, légitimant ainsi la procédure employée »

Le Conseil Constitutionnel de l’époque reconnaît qu’il n’est pas compétent pour s’opposer directement au peuple français. C’est l’affirmation de la souveraineté totale du peuple telle qu’elle est définie dans notre constitution à l’article 3 :

« La souveraineté nationale appartient au peuple qui l’exerce par ses représentants et par la voie du référendum. Aucune section du peuple ni aucun individu ne peut s’en attribuer l’exercice »

L’ESPRIT DE LA CONSTITUTION

Il apparaît clairement, dans l’esprit de notre Constitution, qu’en cas de difficulté ou de crise pouvant entraîner des troubles de l’ordre public, le peuple français doit avoir le dernier mot.

Le Président, aux termes de cette dernière, est élu au suffrage universel. S’il existe un désaccord ou une perte de confiance grandissante entre le Président de la République et une majorité du peuple français, celui-ci peut-il continuer à exercer ses fonctions ?

Les dernières élections européennes ont montré très clairement que la liste, pourtant soutenue activement par Emmanuel Macron, n’avait recueilli qu’environ 15 % des votes exprimés et que les sondages publiés depuis indiquaient que seul un français sur quatre faisait encore confiance à Emmanuel Macron. Devant une telle conjoncture, l’esprit de notre Constitution devrait conduire à sa démission.

POURQUOI CE QUI ÉTAIT IMPLICITE DU TEMPS DE DE GAULLE NE L’EST-IL PLUS AUJOURD’HUI ?

Entre-temps, nous avons connu ce qu’il est convenu d’appeler des « cohabitations » Or, quoi qu’on ait pu dire ou écrire, ces cohabitations n’ont jamais été conformes à l’esprit de notre Constitution.

Posez-vous une simple question : Auriez-vous vu de Gaulle accepter une cohabitation avec un Premier Ministre qui était un adversaire déclaré et qu’il aurait lui-même dû nommer ?
Bien évidemment non.
Aujourd’hui, la question de la cohabitation semble se poser à nouveau, compte-tenu des sondages relatifs aux futures élections législatives. Peut-être est-il temps de revenir à l’esprit de notre notre texte fondateur de la Cinquième République qui repose sur la Souveraineté populaire avec l’exercice du pouvoir reposant sur un duo Président-Premier Ministre, ce dernier étant nommé par le premier sans qu’il ne puisse exister de divergences de vue entre eux. Le Premier Ministre ne peut en aucun cas être une sorte de Président-bis qui permettrait au Président de camoufler son impopularité afin de rester en fonction, donnant ainsi l’illusion qu’il laisse le Premier Ministre aux commandes du pays. Ce n’est pas conforme à l’esprit de la Constitution. Seul le Président est responsable devant le peuple.

Élu au suffrage universel, le Président ne peut se maintenir lorsqu’il est désavoué par le peuple.
C’est cette règle implicite qui doit s’appliquer.

Jean Goychman

23/06/2024

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