L’incendie de Notre-Dame-de-Paris.
« Tous les yeux s’étaient levés vers le haut de l’église…
Sur le sommet de la galerie la plus élevée, plus haut que la rosace centrale,
il y avait une grande flamme qui montait entre les deux clochers avec des tourbillons d’étincelles…»
(Victor Hugo, « Notre-Dame de Paris » (1831)
En vieillissant, ce sont souvent des souvenirs anciens, voire des souvenirs d’enfance, qui nous reviennent en mémoire. Lors de la cérémonie de réouverture de Notre-Dame, je me suis remémoré un souvenir vieux de presque un demi-siècle. C’était en 1975. J’avais troqué mon béret rouge pour le costard-cravate des cadrillons du tertiaire. Jeune marié, j’étais élève-inspecteur « Incendie-Accidents et Risques Divers » (IARD) dans une compagnie d’assurance. À cette époque, le marketing n’avait pas supplanté les techniciens et les professionnels compétents. Un bon inspecteur IARD connaissait par chœur la Loi du 13 juillet 1930 – qui sera remplacée, le 16 juillet 1976, par le Code des Assurances (1) – et il devait maîtriser le « tarif blanc » pour l’assurance des « risques simples » et le « tarif rouge » pour celle des « risques industriels ». Notre formation, sérieuse, durait une année complète et d’une promo de douze, comme les apôtres, nous terminâmes à quatre, comme les mousquetaires. La dite formation m’a amené à étudier les moyens de protection des risques, en incendie, vol, etc… ; à visiter des installations sous « IFEA » (2) ; à assister à des cours chez les sapeurs-pompiers de Paris et au CNPP (3) ; et à accompagner nos experts sur de gros incendies. Ensuite, durant ma carrière, je ne saurais dire combien j’ai connu de sinistres importants ; quelques dizaines, quelques centaines ?
Si je vous parle de ça aujourd’hui, c’est pour vous dire que, sans être complotiste, je ne crois absolument pas à la thèse de l’incendie accidentel de Notre-Dame de Paris.
UN INCENDIE ACCIDENTEL ?
Ma longue carrière dans l’assurance ne fait pas de moi un expert irréfutable, mais j’ai des connaissances, une expérience, un vécu, qui m’autorisent à émettre un avis sur le sujet. Juste après l’incendie de Notre-Dame, en 2019, j’ai contesté, dans un article, la version officielle de l’explosion de l’usine AZF de Toulouse survenue le 21 septembre 2001, quelques jours après l’attentat du « World Trade Center ».
Dans mon article, J’écrivais ceci : « L’incendie de Notre-Dame a créé un traumatisme dans l’opinion… Dès l’annonce de ce drame, j’ai pensé à un attentat. Ma carrière d’inspecteur d’assurance m’a donné l’occasion de voir de près un certain nombre d’incendies, parfois des incendies criminels. Sans voir le mal partout, je me demande toujours « à qui profite le crime ? » et je suis étonné, surpris et choqué qu’en démocratie, ceux qui osent évoquer un possible attentat soient traités de « complotistes », alors qu’en France, chaque semaine, une église est vandalisée… ».
Et je dois dire que, depuis lors, les explications plus ou moins fumeuses sur le caractère accidentel de l’incendie me laissent perplexes. J’ai lu, par exemple, que « dès février 2015, un rapport relevait la présence de mégots au sol dans la charpente ». « Le Monde », qui est au pouvoir ce qu’était « la Pravda » dans l’ex-URSS (ou ce qu’est « Ej Moudjahid » dans la dictature algérienne), s’est livré à une enquête qui nous apprend que « à partir de 2014, il n’y avait qu’un seul agent au PC sécurité de Notre-Dame, chargé à la fois de l’écran de surveillance et de la ronde sur le terrain, contre deux précédemment… Personne n’allait vérifier le chantier après le départ des ouvriers, alors qu’il s’agit d’un impératif sur ce type de travaux en l’absence de caméras thermiques… ». C’est sans doute vrai, mais ceci n’explique en rien les raisons du départ de l’incendie, sauf à admettre que n’importe qui pouvait venir se promener dans les combles de la cathédrale avec des intentions malignes et y préparer un attentat. Ça, je veux bien l’entendre.
L’incendie se déclare le 15 avril 2019 (au début de la Semaine sainte), vers 18 h. Il démarre dans la charpente, à la base de la flèche, œuvre de Viollet-le-Duc. La brigade de sapeurs-pompiers de Paris est alertée à 18 h 50. Presque une heure plus tard, pourquoi ? Des renforts sont demandés par les pompiers, notamment deux bras élévateurs articulés (BEA) de 46 mètres de haut, venant du département des Yvelines. Le premier BEA arrivera sur les lieux à 19 h 30 et sera positionné rue du Cloître-Notre-Dame, l’autre arrivera à 20 h et sera positionné devant la façade. À 19 h 50, la flèche de Notre-Dame s’effondre. L’incendie aura mobilisé plus de six cents pompiers, appuyés par dix-huit lances et plusieurs camions à grande échelle. Les sapeurs-pompiers ont fait un travail remarquable et qui mérite d’être salué.
Mais, intéressons nous à la suite de l’incendie :
DES DOUTES SUBSISTENT…
Dès le 16 avril, Benjamin Mouton, ancien architecte des monuments historiques, en charge de la cathédrale de 2000 à 2013, déclarait que la protection incendie avait été portée « à son plus haut niveau ». Un expert avançait que « l’incendie n’a pas pu partir d’un court-circuit, d’un simple incident ponctuel. Il faut une vraie charge calorifique au départ pour lancer un tel sinistre. Le chêne est un bois particulièrement résistant », ce que confirmaient tous les artisans connaissant bien la cathédrale, selon eux : « le bois des charpentes était dur comme de la pierre, vieux de plusieurs siècles ». Le 23 avril 2019, « Le Figaro » cite un article du « Canard enchaîné », qui énumère plusieurs manquements aux normes de sécurité, indiquant que « des fils électriques se trouvaient sous les combles et que sept mégots de cigarettes avaient été retrouvés sur l’échafaudage extérieur ».
À qui va-t-on faire croire qu’un mégot peut mettre le feu à du bois de chêne vieux de plusieurs siècles ?
Le 6 décembre 2024, veille de la réouverture de Notre-Dame, « Mediapart » reprend à son compte une thèse développée par plusieurs journaux fin 2019 : l’incendie aurait été déclenché par l’électrification des cloches placées sous la flèche. Le quotidien parle d’omerta voulue et affirme :
« Une telle cause…parce qu’elle « mouille » le clergé, explique le pas de deux entre le président de la République et l’archevêque de Paris ; le premier tenant ainsi le second par la barbichette… ». D’après Maryvonne de Saint-Pulgent, haut fonctionnaire au ministère de la Culture, « Personne n’a intérêt à obtenir, ni même à chercher, de réponse. Ne serait-ce que pour des raisons économiques colossales, puisque les assurances ne resteraient pas inactives, au vu de l’importance du sinistre, si une responsabilité se voyait désignée. Toutes les conditions sont donc réunies pour qu’on réfléchisse indéfiniment à ce mystère… ».
Personne n’a intérêt, non plus, à évoquer un incendie criminel.
Le Parquet de Paris a ouvert une enquête pour « destruction involontaire par incendie ».
Celle-ci a été confiée à la Police Judiciaire de Paris. Les spécialistes du laboratoire central de la Préfecture de Police guident les techniciens de l’Identité Judiciaire pour les débuts de l’enquête. Les ouvriers du chantier sont entendus, dès la nuit du 15 avril, par les enquêteurs, et le lendemain, alors qu’on ne sait encore RIEN, le procureur de la République de Paris déclare que « rien ne va dans le sens d’un acte volontaire ». Six jours après l’incendie, « les enquêteurs restent prudents sur les circonstances du départ de feu… L’hypothèse d’un acte volontaire, est écartée ». Ben voyons !
Le 25 avril, les techniciens de l’Identité Judiciaire, les enquêteurs de la Brigade Criminelle et les experts du laboratoire central de la Préfecture de Police de Paris sont autorisés à commencer leurs prélèvements et constatations in situ. Dix jours après le sinistre : bizarre, bizarre, non ?
À la fin juin, les enquêteurs indiquent ne pas avoir déterminé les causes de l’incendie, « tout en écartant, en l’état, la piste criminelle…» Dans un communiqué du 26 juin, le procureur Rémy Heitz dit avoir « clôturé l’enquête préliminaire » et figurez vous que dans cette enquête de « 1 125 pages », « aucun élément ne permet d’accréditer l’hypothèse d’une origine criminelle ». Mais les enquêteurs ont établi, « sans déterminer les causes de l’incendie…la piste d’un dysfonctionnement du système électrique ou celle d’un départ de feu occasionné par une cigarette mal éteinte ». Ces hypothèses nécessitent selon eux « des investigations plus approfondies ».
En 2024, l’enquête est toujours en cours. Les quinze ouvriers travaillant à la restauration de la flèche et suspectés d’avoir fumé et mal éteint leurs mégots ont tous été mis hors de cause. Cette affaire est claire comme… du jus de boudin.
Comme pour AZF à Toulouse, je suppose qu’on ne connaitra jamais la vérité ?
Mais commençons, pour rester factuel, à essayer de comprendre à qui profite le crime ?
J’ai pensé, en premier lieu, à un acte de terrorisme islamique. Ceux à qui j’en ai fait part ont poussé des cris d’orfraie. Ils m’ont dit que c’était peu probable, donc peu crédible, car l’attentat n’a pas été revendiqué. Je fais simplement remarquer que – primo – nous n’en savons strictement rien ; le gouvernement peut avoir imposé l’omerta par peur de la sidération que ceci aurait provoqué dans l’opinion, et – secundo – aucun des incendies d’églises n’a été revendiqué, pas plus d’ailleurs que l’explosion d’AZF.
Mais rien, en effet, ne permet d’affirmer qu’il s’agit d’un attentat islamiste.
Aussi j’émets une autre hypothèse, une autre possibilité qui, bien sûr, n’engage que moi.
Notre-Dame de Paris tombait en ruine. Plusieurs mois avant l’incendie – dans le contexte d’un vaste projet pour restaurer l’île de la Cité – une partie de la cathédrale était en travaux, notamment pour nettoyer la flèche, noircie par la pollution, et un ensemble de sculptures métalliques, oxydées.
Le chantier de la flèche devait durer quatre ans et, par la suite, le chœur devait être restauré sur dix ans. L’État, qui n’a plus un sou, a financé à hauteur de 2,5 millions d’euros la restauration de la flèche. Mais cette somme était très insuffisante pour couvrir l’ensemble des travaux de rénovation de la cathédrale. On avait bien tâté quelques mécènes internationaux mais ceux-ci se faisaient tirer l’oreille pour ouvrir leur bourse. La générosité espérée n’était pas au rendez-vous. Bref, le ministère de la Culture n’avait pas les moyens de mener à bien ce chantier titanesque au coût exorbitant.
Et puis, voilà qu’un miracle survient le 15 avril 2019 : pour une cause inconnue, « inexpliquée mais accidentelle » la charpente en chêne pluriséculaire de Notre-Dame prend feu. Et durant les quatorze heures que durera l’incendie, on craindra que tout l’édifice s’effondre. Je subodore, mais ce n’est qu’une hypothèse, que quelques barbouzes auraient pu être chargées de cette basse besogne.
Cette catastrophe créera un émoi énorme, une sidération, bien au-delà de nos frontières. Le coût de la reconstruction sera estimé à 700 millions d’euros (4). Et – ô miracle ! – les dons afflueront du monde entier. Au total, 846 millions d’euros ont été récoltés après de 340 000 donateurs de 150 pays. Il reste encore environ 150 millions qui seront utilisés à des travaux sur la façade.
On ne peut que féliciter nos artisans, menuisiers, verriers, ferronniers d’art, compagnons du devoir, etc…qui ont fait un travail remarquable en un temps record. Malgré la destruction voulue des filières manuelles dans notre pays, il existe encore des métiers d’art et un savoir-faire français, on ne peut que s’en réjouir.
En revanche, j’aimerais savoir combien ont coûté les sept cents vêtements sacerdotaux – chasubles, aubes etc…- conçus par Jean-Charles de Castelbajac ? Le couturier a voulu donner dans les tendances actuelles. Le choix de couleurs criardes fait penser à la pub d’une grande enseigne, ou aux déguisements d’un carnaval (ou d’une « gay-pride »), mais, à mon humble avis, ces couleurs agressives n’avaient pas leur place dans une église.
« Boulevard Voltaire » s’est interrogé sur le coût de ces habits sacerdotaux : « …Imaginez que le clergé revête quelque chasuble tirée du trésor de Notre-Dame… Hélas, les pièces anciennes sont muséifiées et inutilisées, malgré leur caractère vénérable et l’économie qu’elles pourraient générer au bénéfice d’une Église qui court après le denier du culte. Questionné sur le coût de la réalisation de la paramentique castelbajacienne, le diocèse ne nous a pas répondu et l’équipe de M. de Castelbajac nous a fait savoir que le couturier n’était pas en mesure de répondre « en raison de son emploi du temps très chargé »… ». Castelbajac a dit vouloir des ornements « qui parlent aux enfants, aux croyants comme aux athées ». En fait, il les a faits compatibles avec le mobilier. Citons encore « Boulevard Voltaire » : « les chaises Ikea, le baptistère aux allures de coquetier, l’autel en pain de savon, la chaise cathédrale en forme de cercueil, le reliquaire de la Sainte-Croix façon cible à fléchettes. Enthousiaste, l’architecte de Notre-Dame a bien résumé l’apport de l’ensemble : « Comme le monolithe du film « 2001, l’Odyssée de l’espace », l’autel peut tout aussi bien représenter Dieu, l’esprit ou l’intelligence. »…Adopter l’art contemporain n’aboutit qu’à une esthétique vide, dénuée de toute identité, où les chasubles de Castelbajac n’ont pas plus de transcendance que des panneaux routiers… ».
C’est aussi mon point de vue !
Lors de la cérémonie de réouverture de Notre-Dame, Macron a fait un beau discours avec moult références à l’histoire de la cathédrale et à la monarchie. En bon comédien, il a su y mettre le ton ; le public était conquis. Puis nous apprenions que ce texte avait été écrit par Baptiste Rossi, un normalien, « plume » du président, ayant pour mission de contrebalancer le discours progressiste de l’inauguration des JO. Une nouvelle illustration du « et en même temps » macronien. Décidément, tout n’est que comédie chez l’avorton présidentiel ! Mais peut-être suis-je injuste ? Après tout, n’a-t-il pas le mérite d’avoir su trouver les fonds pour restaurer Notre-Dame de Paris ?
Comme quoi, chers lecteurs, il faut croire aux miracles. Surtout au moment de Noël !
Éric de Verdelhan
25 décembre 2024
1)- Comme la « rafle du Vel d’Hiv », ce code, qui allait devenir une usine à gaz, nous est arrivé un 16 juillet, le jour de mon anniversaire.
2)- IFEA ou IEA, dénommée aussi « sprinkler » : Installation Fixe d’Extinction Automatique à Eau.
3)- CNPP : le Centre National de Prévention et de Protection est une association dont la majorité des membres sont des entreprises adhérentes de la Fédération Française des Sociétés d’Assurances (FFSA) et du Groupement des Entreprises Mutuelles d’Assurance (GEMA).
4)- On est loin des 2,5 millions d’euros donnés par l’État avant l’incendie.
La vérité parviendra-t-elle à sortir du puits ? Aujourd’hui on peut en douter mais la Providence peut nous réserver des surprises, non ?