UNION EUROPÉENNE : LA FUITE EN AVANT (Jacques Myard)

« Bien sûr, on peut sauter comme un cabri sur une chaise en criant « l’Europe, l’Europe, l’Europe »…
Mais ça n’aboutit à rien, celà ne signifie rien ! »

(Charles de Gaulle)

 



COMMUNIQUÉ DE PRESSE DE JACQUES MYARD (14 mars 2025)

Membre Honoraire du Parlement
Maire de Maisons-Laffitte
Président du Cercle Nation et République
Président de l’Académie du Gaullisme 

ACADÉMIE GÉOPOLITIQUE DE PARIS
L’AVENIR DE L’ EUROPE : ENJEUX GEOPOLITIQUES

 

L’Europe au sortir de la Seconde Guerre mondiale a suscité un immense espoir et est apparue comme un destin commun inéluctable, afin de sortir des conflits européens.

Malheureusement l’idéologie fédéraliste soutenue par des groupes de pression technocratiques avides de pouvoir l’ont conduite dans une impasse.

En dépit de toute raison la présidente de la Commission et certains politiques pratiquent la fuite en avant.

Il est urgent de revenir à la réalité, construire une organisation de coopération européenne non exclusive dans le village planétaire.

Le destin de la France se joue certes en partie en Europe ; mais aussi en Méditerranée, en Afrique et dans le monde. Elle a tous les atouts pour assurer et tenir son rang dans le concert des Nations.

I / Du Traité de Rome à la constitution de Valéry Giscard d’Estaing : une dangereuse dérive.

9 mai 1950 : Déclaration de Robert Schuman. Salon de l’horloge au Quai d’Orsay :  production charbon et acier de la France et de l’Allemagne sous autorité commune, « La Haute Autorité ».

1952 : Création de la Communauté Européenne du Charbon et de l’Acier : CECA.

1954 : échec de la CED (Communauté Européenne de Défense), qui devait être placée sous tutelle OTAN.

1957 : Traité de Rome (6 pays fondateurs). Traité de coopération des peuples.

Élargissement de l’Union européenne 

  • 1973 : 1er élargissement : Royaume-Uni, Irlande, Danemark (9  États)
  • 1981 : 2ème élargissement : Grèce (10 États)
  • 1986 : 3ème élargissement : Espagne, Portugal (12 États)
  • 1995 : 4ème élargissement: Autriche, Suède, Finlande (15 États)
  • 2004 : 5ème élargissement : Estonie, Lettonie, Lituanie, Pologne, Tchéquie, Slovaquie, Hongrie, Slovénie, Chypre, Malte (25 États)
  • 2007 : 6ème élargissement : Bulgarie, Roumanie (27 États)
  • 2013 : 7ème élargissement : Croatie (28 États)

Pour mémoire : référendum du 23 juin 2016, Brexit (51,99%). La Grande Bretagne quitte l’UE.

Article 88-5 Constitution, réforme du 23 juillet 2008. Toute nouvelle adhésion doit être soumise à référendum ou 3/5ème du Parlement (article 89)

L’approfondissement des compétences

Recherche d’une Europe de plus en plus intégrée

  • 8 avril 1965 : Le Traité de Bruxelles fusionne CEE, Euratom et CECA. Abrogé par le traité d’Amsterdam.
  • 17-28 février 1986 : Acte Unique. Harmonisation législative pour le marché intérieur.

Institution du Conseil Européen qui regroupe chefs d’États et Premiers Ministres (initiative de Valéry Giscard d’Estaing).

  • 7 février 1992 : Traité de Maastricht

◦ Union économique et monétaire : vers la monnaie unique

◦ Institution Politique Etrangère et Sécurité : PESC

◦ Nouvelles compétences pour l’UE : Justice

  • 2 octobre 1997 : Traité d’Amsterdam 
  • 26 février 2001 : Traité de Nice adapte les institutions à l’élargissement
  • 2005 : Traité Constitutionnel : échec des Référendums en France et Pays-Bas.
  • 13 décembre 2007 : Le Traité de Lisbonne reprend des dispositions du « Traité Constitutionnel ».

Le Traité de Lisbonne est composé

  • Traité sur l’Union Européenne (TUE)
  • Traité sur le Fonctionnement de l’UE (TFUE)

L’UE demeure une organisation internationale (les États gardent leurs compétences)

Tout Etat peut quitter l’UE (article 50) mais l’UE acquiert de multiples compétences.

L’UE devient omnipotente (80% des lois nationales ont pour origine l’UE)

II / L’UE devient une usine à gaz

Avec le Traité de Lisbonne, l’UE est frappée de boulimie sous l’action de la Commission qui prend très souvent l’ascendant sur les États, sachant les manœuvrer et les diviser pour arriver à ses fins.

Parfois d’ailleurs avec la complicité de certains fonctionnaires français qui « poussent » à Bruxelles des projets rejetés par le Parlement français.

L’UE traverse de multiples crises :

  • Crise agricole
  • Crise de l’euro
  • Atermoiement du Parlement sur les données des passagers aériens (PNR)
  • Crise des migratoire
  • Crise des travailleurs détachés
  • Accord de commerce : l’Italie refuse de ratifier le CETA
  • Tensions franco-allemandes sur l’énergie nucléaire.

La RFA soutient les écologistes français

  • Crise linguistique : l’UE devient une machine à angliciser au mépris de l’égalité des langues, recul du français.

L’Union Européenne est menacée d’implosion : « Qui trop embrasse mal étreint »

III / Les États doivent reprendre la main

« Ce n’est pas en fusionnant les souverainetés au bénéfice des technocrates, en ignorant la réalité séculaire des Nations que l’on peut construire l’Europe » (Raymond ARON) 

  • L’UE est financée par les États
    • RFA 20,6%
    • France 15,6% soit en 2017 : 21,113 Mds €
  • Recentrer le périmètre de l’UE :  principe de subsidiarité
  • Recadrer la Commission notamment en matière de concurrence.
  • Recadrer le Comité des Régions qui préfigure l’Europe des Habsbourg : la Commission joue les régions contre les États-Nations
  • La sécurité et la défense

Le Traité de Lisbonne dans son protocole 4, article 2, met en place une coopération de programmes européens d’équipements dans le cadre de l’agence européenne de défense.

En 2019-2020 l’UE met en place un fonds européen de défense pour financement de la recherche en matière d’armement : prévision 20 milliards pour période budgétaire

2021-2027 : il ne s’agit en réalité que de la mutualisation des moyens nationaux.

Rappel

Article 42-7 du Traité sur l’UE :

« Les engagements et la coopération dans ce domaine (PESC) demeurent conformes aux engagements souscrits au sein du traité de l’Atlantique Nord qui reste, pour les Etats qui en sont membres, le fondement de leur défense collective et l’instance de sa mise en œuvre. »

Aucun État européen n’a remis en cause cette disposition.

L’Europe de la Défense ou plus exactement la Défense de l’Europe restera-t-elle une idée d’avenir qui le restera longtemps ou Trump va-t-il réveiller l’Europe comme le pense Emmanuel Macron ?

IV / Le réveil de l’UE ou la fuite en avant ?

 

La guerre en Ukraine

Donald Trump est décidé à négocier avec la Russie de Poutine sans les Européens. Il s’agit là d’un revirement complet des Etats-Unis.

La guerre en Ukraine n’est pas bleu-blanc. Les anglo-saxons notamment les Anglais ont agi de manière permanente contre la Russie.

George Kennan, ancien ambassadeur américain à Moscou dans les années 1950 et inventeur alors de la politique du « Containement » donne un entretien à Foreign Affairs en 1998 qui met en garde les Etats-Unis contre leur politique aventureuse à l’égard de la Russie qui va conduire à une à un affrontement certain : « Warning on NATO expansion » !

Refus de Boris Johnson d’autoriser le projet d’accord d’Istanbul de mai juin 2022.

Déclaration de la chancellerie Merkel (décembre 2023), confirmée par Hollande, sur le leurre des accords de Minsk, qui nous nous ont été présentés en Commission des Affaires étrangères comme la solution politique par excellence au conflit ; alors que ces accords n’avaient qu’un but : gagner du temps pour armer l’Ukraine !

5 mars 2025 : l’alarme d’Emmanuel Macron

Dans son discours radio et télé diffusé aux Français, E. Macon sonne le tocsin :

« Au-delà de l’Ukraine, la menace russe est là et touche les pays d’Europe. Nous touche. »

La Russie est désignée comme la menace.
La Russie ne nous fait pas de cadeau et agit de multiples façons pour effectuer des rétorsions à nos sanctions.
Le discours du Président français est abondamment moqué à Moscou.
La Russie est-elle pour autant une menace pour la France ?

« Est-on toujours à l’époque de la guerre froide avec des chars soviétiques à deux étapes du Tour de France ? » comme disait de Gaulle ?

Il est indubitable qu’Emmanuel Macron a volontairement utilisé cette guerre pour reprendre pied en politique alors qu’il est discrédité aux niveaux national et international.

Son discours anxiogène s’apparente à la fabrication de l’ennemi pour tenter de souder l’opinion publique.
De plus il joue les apprentis sorciers avec la dissuasion nucléaire française.

« Répondant à l’appel historique du futur chancelier allemand, j’ai décidé d’ouvrir le débat stratégique sur la protection par notre dissuasion de nos alliés du continent européen »…

…Tout en affirmant « que la décision a toujours été et restera entre les mains du Président de la République, Chef des armées ».

C’est là une faute, un oxymore.

6 mars 2025 : Conseil européen extraordinaire

Le Conseil du 6 mars :

  • Réaffirmer la solidarité de l’UE avec l’Ukraine
    L’UE a fourni 135,4 milliards d’euros à l’Ukraine dont 49,2 milliards de soutien militaire.
  • Négocier la Paix

Pas de négociation sur l’Ukraine sans l’Ukraine et sans la participation de l’Europe. La Paix doit respecter l’intégrité territoriale de l’Ukraine.

Défense européenne (présence de Zélensky) :

  • Dérogation au pacte de stabilité
  • Proposition de 150 milliards de prêts
  • Acquisition conjointe d’équipements militaires européens

Coup d’État institutionnel de la Présidente de la Commission

Avant même que les Chefs d’Etats évoquent les résultats du Conseil du 6 mars 2025, on a vu et entendu la Présidente de la Commission Ursula von der Leyen annoncer dès le 3 mars un plan sur 5 ans de 800 milliards d’euros pour la défense : lettre aux Etats le 4 mars.

Alors que la Commission n’a pas de compétence en matière de défense, c’est le rôle des Etats comme l’a rappelé le ministre de la Défense français.

C’est une faute qui crée la confusion.

V / Une parfaite fuite en avant

Le discours tocsin d’Emmanuel Macron, les effets d’annonce de Ursula von der Leyen, les décisions virtuelles du Conseil Européen du 6 mars sont-ils la prise en compte de la réalité géostratégique de l’Europe ?

En d’autres termes, l’UE et ses dirigeants prennent-ils la mesure des enjeux ? Rien n’est moins certain.

Que fera l’Europe, la France en particulier, si la trêve est conclue entre Trump et Poutine ?

L’UE pourra t-elle continuer à aider militairement l’Ukraine ? Le risque est évident, l’UE sera en porte-à-faux avec la réalité.

L’Union Européenne sera même accusée d’être un fauteur de tensions, pour ne pas dire de guerre.

C’est à juste titre qu’Henri Guaino fustige cette escalade et dénonce la politique aventureuse d’Emmanuel Macron qui s’apparente à celle d’un va-t-en-guerre. Il accroît les tensions et rate l’occasion de retrouver sinon un accord, du moins une entente avec le Kremlin.

Cela ne signifie pas que tout puisse être réglé avec Moscou, mais une chose est certaine : la France prend le contre-pied de la démarche de Washington.

C’est une fuite en avant. Au lieu de garder raison et de ne pas accroître les tensions. « Somnambule, l’Union européenne marche vers la guerre ».

Il est urgent que la France recouvre la raison, le sens de ses intérêts géostratégiques, et surtout conduise une politique étrangère et de défense indépendante.

La Russie fait partie de l’équilibre géostratégique de l’Europe. Paris ne peut pas l’oublier.

Quel avenir pour l’UE ?

  • La coopération européenne reste une nécessité.
  • Bruxelles doit cesser de nourrir une idéologie intégrationniste.
  • La Commission doit être recentrée et ne pas se substituer aux États.
  • Les États doivent reprendre le pouvoir, l’UE doit être une union des États-Nations.
  • Le Comité des régions est inutile et porteur de dérive.
  • La subsidiarité est la clé de voûte d’un fonctionnement en responsabilité. Il y a trop de compétences attribuées à Bruxelles.

L’UE s’est élargie, elle doit s’amaigrir

  • L’UE ne doit pas contrer les initiatives françaises en Méditerranée, en Afrique et dans le monde.
  • La défense de la France est une défense nationale, on ne discute pas de nos forces nucléaires avec quiconque, l’adversaire doit rester dans le doute complet sur son utilisation.
  • La dette française ne peut pas trouver de solution avec la rigidité des Traités
  • Il est indispensable de revenir aux avances de la Banque de France au Trésor pour l’investissement conformément à ce qui se pratiquait jusqu’en 1992, et qui a été interdit par le traité de Maastricht (article 123 du TFUE)
  • Les traités obsolètes peuvent être remis en cause par le principe du droit international :

Rebus sic Stantibus (*)

  • Il est urgent de prendre conscience que la rigidité des traités de l’UE sont autant de carcans qui mettent en péril nos intérêts.
  • La France doit agir pour une remise en cause de cette usine à gaz.

A défaut, l’avenir de l’UE est en péril. La France doit privilégier la coopération et non l’intégrisme rigide et autoritaire.
Les États-Nations demeurent le fondement intangible de l’avenir de l’UE.

Jacques MYARD

www.jacquesmyard.fr

14 mars 2025

* En l’état actuel des choses

 

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