LFI EST EN PLEINE DÉRIVE RÉACTIONNAIRE ET PRO-ISLAMISTE (Naëm Bestandji)

La France insoumise veut créer une commission d’enquête sur l’islamophobie. L’essayiste Naëm Bestandji, auteur de « Le linceul du féminisme » (Seramis), y voit un symptôme de la dérive réactionnaire de la formation politique de Jean-Luc Mélenchon. S’il rejoint le philosophe Henri Peña-Ruiz sur la dénonciation du terme « islamophobie », il pense, contrairement à lui, qu’il ne faut pas non plus parler de « racisme antimusulman ».

Article publié dans le journal Marianne du 17/04/2025

Le mercredi 9 avril 2025, La France Insoumise (LFI) a déposé à l’Assemblée nationale une « proposition de résolution, tendant à la création d’une commission d’enquête portant sur l’islamophobie ». Point d’orgue de sa dérive réactionnaire et pro-islamiste, sa prose est intéressante à analyser.

LFI s’inquiète de la « montée de la méfiance envers l’islam ». Depuis la Révolution française, la gauche a toujours lutté contre l’emprise du christianisme sur la société et les individus. Dire que la gauche était méfiante envers cette religion est un euphémisme. Elle lui était particulièrement hostile. Mais aujourd’hui, une frange perdue de la gauche, dont LFI est le fer de lance, ne s’inquiète pas de l’emprise grandissante de l’islam (de plus, dans sa version extrémiste) sur des individus et des portions de la société. Elle est passée du côté des bigots et des conservateurs en s’inquiétant de la méfiance envers une seule religion, l’islam. Pourquoi ? Au-delà, peut-être, d’avoir des convictions personnelles réactionnaires tout en se prétendant de gauche, LFI a une vision paternaliste des musulmans, perçus comme uniformes et exotiques. Elle assigne tous les musulmans à la frange extrémiste de l’islam, incapables d’évoluer, d’embrasser le commun de la société française. Elle considère qu’on ne peut pas les tirer vers le haut. Alors il faut les maintenir en bas, sous l’emprise de leur dogme religieux, contrairement au reste de la société française qui s’en est émancipé.

ALLIÉ DE L’ISLAMISME

Pour justifier sa présentation, LFI s’appuie notamment sur des chiffres fournis par le Collectif contre l’Islamophobie en Europe (CCIE). Ce collectif est la reconstitution en Belgique du Collectif contre l’Islamophobie en France (CCIF), dissout en raison de sa radicalité religieuse. Le CCIE/CCIF est idéologiquement la branche juridique des Frères musulmans. Ses statistiques sont farfelues, comptant parfois comme « actes islamophobes » des évènements qui n’ont rien à voir avec l’hostilité envers les musulmans. Mais peu importe pour LFI. Sous le charme des islamistes, elle est un soutien de longue date. Cette proposition de création d’une commission d’enquête sur l’islamophobie est largement le fruit de leur partenariat. Leur dernière rencontre, le 12 mars 2025, a même eu lieu au sein de l’Assemblée nationale sur invitation de LFI. Deux organisations islamistes ont été conviées par le parti : Étudiants musulmans de France (EMF), branche estudiantine des Frères musulmans, et le CCIE. Une nouvelle fois, la France Insoumise n’a eu aucun complexe à s’allier et à soutenir une extrême droite religieuse pour défendre des idéaux réactionnaires aux antipodes des valeurs de gauche. Au point d’ouvrir les portes du cœur de notre République, l’Assemblée nationale, à des islamistes.

Le thème de cette table ronde ? La lutte contre l’offense à l’Islam (« islamophobie »), qui aura largement inspiré cette proposition de résolution. Le ton, le vocabulaire et la rhétorique utilisés dans cette résolution sont rigoureusement les mêmes que ceux de l’islamisme politique. Le sujet du voile en est un exemple frappant. LFI enfonce le clou en citant comme source le sociologue Julien Talpin, étroitement lié à l’association « Alliance citoyenne » avec qui il a créé l’Institut Alinsky dont il est le président. Alliance citoyenne, qui érige le patriarcat islamiste en valeur émancipatrice, est une association qui assure une des jonctions entre extrême gauche et extrême droite musulmane. Elle a mené les offensives burqini à Grenoble et a créé les « hijabeuses » dans le football, toutes inspirées par les méthodes de l’Institut Alinsky. Julien Talpin a toujours soutenu les actions de l’association.

Cohérent dans son paternalisme et orientalisme, il s’affiche lors de conférences avec des islamistes pour essentialiser tous les musulmans à la frange extrémiste de l’islam. Ce fut le cas, par exemple, avec Marwan Muhammad, ex-directeur du CCIF, ou le néo-salafiste Elias d’Imzalene. Son but n’est pas de les critiquer mais de faire « front commun » (sic). Il leur est alors naturel de valider un terme au cœur de la stratégie victimaire de l’islamisme : « islamophobie ».

L’« ISLAMOPHOBIE », CŒUR POLITICO-RELIGIEUX DE LFI

Pour les partisans de la lutte contre l’« ISLAMophobie », l’islam devrait avoir un statut particulier, un privilège d’intouchabilité. Tout obstacle à l’expression de cette religion, même à ses dérives, serait de « l’islamophobie » à combattre. La volonté d’établir un délit de blasphème, uniquement valable pour l’islam, est bien vivace.

Pour faire passer la pilule, les partisans du terme « islamophobie » ambitionnent de fusionner une idéologie religieuse avec des individus pour ne plus distinguer l’offense à une religion de l’hostilité contre des personnes en raison de leurs croyances. Ils instrumentalisent la seconde (les discriminations que subiraient des musulmans doivent être punies) pour tenter d’interdire la première. De plus, ces mêmes partisans considèrent l’islamisme comme l’islam tout court, et les islamistes comme de simples pieux musulmans opprimés. Ainsi, toute critique de l’extrémisme musulman est considérée être une critique contre l’islam donc contre tous les musulmans.

Le concept « islamophobie » va encore plus loin puisqu’il vise à faire de l’offense à cette religion une forme de racisme. Le musulman, fidèle d’une religion censée être choisie, devient le Musulman, membre assigné à un peuple imaginaire. La liberté de conscience devient caduque. Dit autrement, exprimer sa crainte ou son rejet de l’islam (et de l’islamisme), ou même encadrer l’expression de cette religion à égalité avec toutes les autres croyances serait s’en prendre à une ethnie (les Musulmans). Cela crée, de fait, une notion de blasphème spécifique à cette religion. C’est ce que souhaite l’islamisme pour tenter de faire taire toute opposition et dans l’espoir que, un jour, cela se traduise juridiquement dans le Code pénal. LFI ne s’en cache pas. Dans sa « proposition de résolution tendant à la création d’une commission d’enquête portant sur l’islamophobie », elle confirme à de multiples reprises fusionner islam et musulmans.

LE PIÈGE DU TERME « RACISME ANTIMUSULMANS »

Je suis donc en accord avec la tribune d’Henri Peña-Ruiz sur la dénonciation du terme « islamophobie ». Toutefois, je diverge de son analyse sur l’usage de « racisme antimusulman ». Cela rejoint en partie l’usage du terme « islamophobie ». La laïcité ne concernerait plus les musulmans, remplacée par les lois qui punissent le racisme. Or, être raciste contre l’adhésion à un concept (politique, religieux, philosophique ou autre) n’a aucun sens. Cette essentialisation qui ferait de l’islam une caractéristique raciale, au-delà d’assigner et d’empêcher les musulmans de s’émanciper de l’islam, rejoint la dangerosité du terme « islamophobie » : l’islamité serait comparable à la couleur de peau. La liberté de conscience devient caduque.

Henri Peña-Ruiz fait bien la distinction entre croyance et croyant : « La catholicophobie n’est pas un racisme, pas plus que la judaismophobie, car elles visent des croyances religieuses. L’athéophobie n’est pas non plus un délit. » Il utilise les termes qui, selon moi, sont plus appropriés pour nommer l’hostilité envers des individus en raison de leurs croyances, comme « la judéophobie et la musulmanophobie ». Mais en considérant ces derniers comme « des racismes effectifs » équivalents au racisme anti-Arabe, il brouille les perceptions et se contredit lui-même. En effet, il affirme à juste titre que « on ne peut mettre sur le même plan l’islamophobie et l’antisémitisme ».

Or, la judéophobie n’est pas synonyme de l’antisémitisme, même si la première peut être incluse dans la seconde. La judéophobie, tout comme la musulmanophobie, concerne l’hostilité envers des individus en raison de leurs croyances. L’antisémitisme est un racisme car il concerne l’hostilité envers des individus pour ce qu’ils sont en tant qu’êtres humains, peu importe leurs croyances. Dans l’Allemagne nazie par exemple, les Juifs athées ou catholiques étaient autant persécutés que les autres. Au-delà du judaïsme, l’antisémitisme s’appuie sur des caractéristiques physiques et des supposés traits de caractères comme l’appât du gain, bien loin de la religion.

La musulmanophobie, quant à elle, ne concerne pas seulement les « Arabes », mais aussi les Asiatiques (comme les Ouïghours persécutés par le gouvernement chinois), les convertis à l’islam, etc. Il est donc fondamental de distinguer la musulmanophobie du racisme. Les deux sont punis par la loi, mais ils ne sont pas synonymes. Le racisme antimusulman n’a pas plus de fondement que le racisme anticapitaliste, le racisme anticommuniste ou le racisme antivegan.

Naëm Bestandji

17/04/2025

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